Épiphyte
Les épiphytes[1] (du grec έπί « sur », φυτόν « végétal »; littéralement « à la surface d'un végétal ») sont des plantes qui poussent en se servant d'autres plantes comme support. Il ne s'agit pas de plantes parasites car elles ne prélèvent rien au détriment de leur hôte. Les épiphytes sont des organismes autotrophes photosynthétiques ; ils sont capables d'absorber l'humidité de l'air et trouvent les sels minéraux, partiellement dans l'humus qui peut se former à la base des branches, et pour une autre partie dans les particules et gaz, absorbés ou solubilisés dans l'eau de la pluie et des rosées. Ce type de plantes est particulièrement bien représenté chez les ptéridophytes, les orchidées, les broméliacées, les aracées, les pipéracées et les bégoniacées. On les rencontre surtout dans la zone intertropicale, et plus particulièrement dans les forêts ombrophiles. Certains arbres, à l'écorce lisse ou phytotoxique, ou se desquamant régulièrement, sont exempts ou presque dépourvus d'épiphytes.
En zone tempérée, la présence et la diversité de lichens épiphytes sont considérées comme des bioindicateurs de la qualité de l'air et de l'environnement.
L’épiphytisme désigne l'ensemble des caractères d'un taxon rendant possible sa vie en épiphyte.
Sommaire
1 Écosystèmes suspendus
2 Écosystèmes aquatiques
3 Exemples de plantes épiphytes
4 Les épiphytes et les humains
4.1 Intérêt historique et patrimonial
4.2 Épiphytes et rendement des arbres cultivés
5 Statut de conservation
5.1 Menaces
5.2 Gestion écologique, renaturation
6 Notes et références
7 Voir aussi
7.1 Articles connexes
7.2 Liens externes
7.3 Bibliographie
Écosystèmes suspendus |
Les plantes et organismes épiphytes contribuent à la complexification naturelle des écotones, multipliant ainsi l'offre en micro-habitats sur un arbre, sur un tronc[2] ou dans l'écosystème.
Plusieurs épiphytes peuvent successivement pousser les uns sur les autres et accumuler de l'eau au point, où, dans les forêts tropicales pluvieuses, des branches se brisent, cédant sous le poids de plusieurs tonnes d'eau, accumulée dans les mousses et les broméliacées.
Des écosystèmes suspendus complexes se constituent ainsi au fil du temps. Sous les tropiques, certains invertébrés et de nombreux amphibiens peuvent y passer toute leur vie, et pendant plusieurs générations, sans jamais descendre au sol, en buvant et pondant leurs œufs dans l'eau accumulée dans les phytotelmes des broméliacées.
Plantes épiphytes diverses à Santa Elena au Costa Rica.
En zone tropicale, les troncs morts ou sénescents peuvent encore supporter une flore qui abrite de nombreux invertébrés (ici broméliacées au Costa Rica, côté Atlantique).
La flore épiphyte d'Auray (France) est riche. Elle est proche de celle qu'on trouve sur les murs à proximité, qui bénéficient eux-aussi du climat océanique et d'une hygrométrie souvent élevée.
Écosystèmes aquatiques |
Sous la mer, des communautés spécifiques d'épiphytes existent sur les frondes d'algues géantes des forêts de kelp, ou encore par exemple sur les feuilles et rhizomes d'herbiers marins[3] mais aussi ou sur les zostères de la zone intertidale[4]. Elles varient selon le degré d'eutrophisation du milieu[3].
Dans les espaces restreints, en aquariophilie notamment, en raison d'une eutrophisation rapide du milieu, les algues et bactéries épiphytes peuvent produire des tapis envahissants sur les plantes aquatiques.
Épiphytes en aquarium d'eau douce
Aquarium couvert de plantes
Exemples de plantes épiphytes |
algues (éventuellement associées à des champignons, formant alors des lichens)- mousses
- polypodiacées
- orchidacées
- broméliacées
- aracées
- certaines cactacées des genres Epiphyllum, Schlumbergera, Disocactus
- bégoniacées
- moracées
- éricacées
- gesnériacées
- pipéracées
- asclépiadacées
- le gui
Remarque: certaines plantes, comme les Moracées, ont une première phase épiphyte, avant d'envoyer des tiges aériennes vers le sol, qui s'enracineront; ce mode de croissance est dit hémi-épiphyte. Il en est de même pour certaines aracées qui germent au sol, puis continuent leur croissance sur un support (tronc, rocher...) pour finir leur vie en épiphyte au sens strict, leur partie terrestre se désagrégeant au profit de leur partie aérienne.
Les épiphytes et les humains |
Intérêt historique et patrimonial |
Selon Rebecca & al. (2011)[5], les épiphytes conservés sur des bois ou arbres très anciens utilisés en charpentes de toitures ou conservés depuis l’époque pré-industrielle ont une réelle valeur archéologique et pour l’écologie rétrospective, en particulier les lichens dont certaines espèces (ex : Pertusaria dont Pertusaria leioplaca), ont une croissance très lente et vivent très longtemps (décennies à siècles) puis peuvent avoir été conservés desséchés durant encore des siècles ou décennies.
Épiphytes et rendement des arbres cultivés |
La plupart des épiphytes ne sont pas une gêne pour les arbres-supports, même s'il existe des parasites comme le gui ou des plantes étrangleuses comme les célèbres figuiers étrangleurs (des hémi-épiphytes en réalité puisque leurs racines finissent par devenir autoportantes).
Ainsi le lierre fait partie de l’écosystème de nombreuses forêts de zone tempérée, et on a récemment montré que les épiphytes n’améliorent ni ne diminuent le rendement des cacaoyers (dont la fève pousse sur le tronc)[6]. Généralement ce qui est perdu en terme d’interception de l’eau[7] ou de la lumière est gagné en qualité de microclimat (tampon thermo-hygrométrique), en richesse et présence plus longue de pollinisateurs et d’une biodiversité favorable à la résilience des arbres et de la forêt.
Statut de conservation |
Menaces |
Nombre d'épiphytes semblent pouvoir être menacées par les pesticides ou pollutions acides, et plus directement encore par les coupes rases ou des éclaircies trop « dures »[8], par le rajeunissement excessif des forêts (et généralement conjointement par la raréfaction des très grands arbres anciens dominants et émergents au-dessus de la canopée, y compris en forêt tempérée pluvieuse comme on l'a montré au Chili[9]).
La fragmentation forestière, mais aussi le dérèglement climatique sont d'autres facteurs de menace[10] et en particulier quand ils contribuent à assécher le microclimat forestier, par exemple en forêts feuillues sempervirente humides de montagne selon une expérience conduite récemment (publication 2012) dans le sud-ouest de la Chine[11].
Gestion écologique, renaturation |
Quelques expériences (dont en chênaies de zone tempérée[12]) ont montré qu'une gestion restauratoire de la forêt par coupe sélective orientée vers la conservation des arbres les plus riches en épiphytes patrimoniaux et/ou menacés permet d'une part d'augmenter dans ces arbres la densité des espèces en question, tant pour les lichens que les bryophytes, et au profit de la conservation, mais aussi de favoriser une recolonisation des autres arbres de la parcelle ou d'arbres proches (à une vitesse qui peut dépasser 60 m en 8 ans)[12].
Notes et références |
Nota bene : Épiphyte est masculin.
LeBlanc, F. 1960. Écologie et phytosociologie des épiphytes corticoles du sud du Québec. Thèse de doctorat. Université de Montréal.
David Balata, Iacopo Bertocci, Luigi Piazzi, Ugo Nesti (2008), Comparison between epiphyte assemblages of leaves and rhizomes of the seagrass Posidonia oceanica subjected to different levels of anthropogenic eutrophication ; Estuarine, Coastal and Shelf Science, Volume 79, Issue 3, 10 September 2008, Pages 533-540.
Benoit Lebreton, Pierre Richard, Gilles Radenac, Monique Bordes, Martine Bréret, Christophe Arnaud, Françoise Mornet, Gérard F. Blanchard (2009), Are epiphytes a significant component of intertidal Zostera noltii beds ? ; Aquatic Botany, Volume 91, Issue 2, August 2009, Pages 82-90.
Rebecca Yahr, Brian J. Coppins, Christopher J. Ellis (2011), Preserved epiphytes as an archaeological resource in pre-industrial vernacular buildings ; Journal of Archaeological Science, Volume 38, Issue 6, June 2011, Pages 1191-1198 (résumé)
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Dirk Hölscher, Lars Köhler, Albert I.J.M. van Dijk, L.A.(Sampurno) Bruijnzeel (2004), The importance of epiphytes to total rainfall interception by a tropical montane rain forest in Costa Rica ; Journal of Hydrology, Volume 292, Issues 1–4, 15 June 2004, Pages 308-322 (résumé)
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Christopher J. Ellis, Brian J. Coppins, Terence P. Dawson (2007), Predicted response of the lichen epiphyte Lecanora populicola to climate change scenarios in a clean-air region of Northern Britain ; Biological Conservation, Volume 135, Issue 3, March 2007, Pages 396-404 (résumé)
Liang Song, Wen-Yao Liu, Nalini M. Nadkarni (2012), Response of non-vascular epiphytes to simulated climate change in a montane moist evergreen broad-leaved forest in southwest China Original Research Article Biological Conservation, Volume 152, August 2012, Pages 127-135
jörn Nordén, Heidi Paltto, Christina Claesson, Frank Götmark (2012), Partial cutting can enhance epiphyte conservation in temperate oak-rich forests Original Research ArticleForest Ecology and Management, Volume 270, 15 April 2012, Pages 35-44B
Voir aussi |
Articles connexes |
- Kokedama
- Forêt
- Écologie forestière
- Arbre
- Rémanent
- Fragmentation forestière
- commensalisme
Liens externes |
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- Site spécialisé sur les Cactées épiphytes
Bibliographie |
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