Révolution de Mars
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La révolution de Mars (Märzrevolution en allemand), également dénommée révolution allemande de 1848, est le Printemps des peuples germanique. Il s'agit de l'ensemble des révolutions qui éclatèrent entre mars 1848 et la fin de l'été 1849 au sein de la Confédération germanique et dans les provinces et pays sous domination de l'empire d'Autriche (Hongrie et Italie du Nord) et du royaume de Prusse (Posnanie).
Le Vormärz qui précéda fut marqué par la restauration politique mise en place par la Sainte-Alliance et en particulier par le chancelier autrichien Metternich. En outre, le début de la révolution industrielle provoqua un appauvrissement des artisans et une aggravation des problèmes sociaux.
Après les révolutions en Italie début janvier 1848 et en France en février, les États allemands rejoignirent le soulèvement européen. Les révolutionnaires des États allemands aspiraient à l'établissement des libertés politiques ainsi qu'à l'unité nationale.
La révolution commença dans le grand-duché de Bade. Elle se propagea en quelques semaines dans les autres États de la Confédération. Elle força la désignation de gouvernements libéraux et l'élection d'un parlement national qui se rassembla dans la ville libre de Francfort. Après les premiers rapides succès du printemps 1848, le mouvement se fit plus défensif à l'été. L'automne 1848 et les campagnes pour la reconnaissance de la Constitution de Francfort de mai 1849 connurent un nouveau pic de soulèvements, ayant localement des allures de guerre civile, mais ne purent empêcher l'échec de la révolution.
Les libéraux et les démocrates s'opposèrent au parlement de Francfort. Les premiers privilégiaient la monarchie constitutionnelle ; les seconds donnaient plus d'importance à la souveraineté du peuple. Enfin, les plus radicaux revendiquaient une république. Après de longs débats, ils s'entendirent en décembre 1848 sur un ensemble de droits fondamentaux et, en mars 1849, sur une constitution. Le 3 avril suivant, Frédéric-Guillaume IV de Prusse refusa cependant la couronne impériale proposée par la Kaiserdeputation, mettant ainsi fin aux espoirs d'unification.
Cette tentative de création d'un État-nation unifié et démocratique fut violemment réprimée en juillet 1849 par les troupes prussiennes et autrichiennes. La révolution de Mars se solda donc par un échec.
La révolution fut suivie par une période de réactions politiques. Les acquis de la révolution n'étaient cependant pas négligeables, marqués par la fin de la féodalité et un fort développement de la presse. Elle est aussi souvent considérée comme essentielle pour le développement du mouvement ouvrier et du féminisme en Allemagne.
La révolution fut mise au ban par les régimes qui ont suivi. Ce n'est qu'à partir de la république de Weimar, qui s'inspira de la constitution de Francfort pour sa Loi fondamentale, que l'héritage révolutionnaire eut valeur de référence politique. Par la suite, l'Allemagne de l'Ouest et celle de l'Est se le disputèrent.
Sommaire
1 Causes et signes avant-coureurs
1.1 Contexte économique et social
1.2 Contexte politique
1.2.1 Congrès de Vienne et début de la Restauration
1.2.2 Fête de la Wartbourg et décrets de Karlsbad
1.2.3 Révolution de 1830
1.2.4 Fête de Hambach et attaque de la Garde de Francfort
1.2.5 Guerre de Sonderbund et veille de la révolution de Mars
2 Déroulement
2.1 Prémices
2.2 Repères chronologiques
2.3 Fin
3 Théâtres de la révolution de Mars
3.1 Grand-duché de Bade
3.2 Territoires sous domination prussienne
3.2.1 Prusse
3.2.2 Posnanie et Pologne
3.3 Territoires sous domination autrichienne
3.3.1 Autriche
3.3.2 Bohême
3.3.3 Hongrie
3.3.4 Provinces et États italiens
3.4 Bavière
3.5 Saxe
3.6 Holstein et Schleswig ; première guerre dano-allemande
4 Le parlement de Francfort
4.1 Formation du parlement
4.2 Structure et constitution du parlement
4.3 Débats
4.4 Vote de la constitution, puis refus de la couronne impériale
4.5 Fin du parlement et de la révolution
5 Répercussions et conséquences en Allemagne
5.1 Conséquences immédiates
5.2 Acquis de la révolution
5.3 Influences sur les différentes mouvances politiques et associatives
6 Historiographie
6.1 Postérité de la révolution
6.2 Causes de l'échec
7 Notes et références
7.1 Références
7.2 Citations originales
8 Voir aussi
8.1 Bibliographie
8.1.1 En allemand
8.1.2 En anglais
8.1.3 En français
8.2 Articles connexes
Causes et signes avant-coureurs |
Contexte économique et social |
Un signe avant-coureur de la révolution de Mars en Europe centrale fut la crise de 1847 consécutive à la très mauvaise récolte de l'année précédente. Dans les pays allemands, l'augmentation des prix des denrées agricoles entraîna des famines et des révoltes de la faim presque partout[1]. La fraction la plus pauvre de la population composée des ouvriers, artisans appauvris, travailleurs agricoles, etc., soutint les revendications des cercles démocratiques et libéraux[2]. Une autre conséquence de la crise fut la diminution de la valeur de la monnaie dans la commercialisation des produits industriels, ce qui causa, entre autres, le déclin du secteur textile, encore largement dominé par l'artisanat[3].
Le secteur textile était encore le fait d'un travail à domicile généralisé : pour un faible salaire, nombreuses étaient les familles des campagnes allemandes qui cédaient leur production à quelques riches entrepreneurs et propriétaires fonciers. Son déclin et généralement celui de l'ensemble de l'artisanat étaient aussi dus à la progression de la révolution industrielle dans toute l'Europe[4], celle-ci bouleversant peu à peu les rapports sociaux, économiques et industriels de tout le continent autour du milieu du XVIIIe siècle sous l'effet des inventions techniques venant du Royaume-Uni. De plus, il y eut à cette époque une forte croissance démographique à la campagne comme à la ville résultant de l'augmentation de la productivité agricole, tandis que l'industrie ne pouvait employer un tel volume de main-d'œuvre, ce qui causa un taux de chômage extrêmement important et l'émergence d'un prolétariat. La main-d'œuvre excédentaire formait une « armée de réserve de travailleurs »[5]. Les villes étant en expansion continuelle, de plus en plus de personnes cherchèrent du travail dans les manufactures et les usines construites pour la fabrication de produits nouveaux et à bon marché grâce à une production en série plus efficace[6].
Les conditions de vie et de travail dans les entreprises industrielles et leur environnement étaient, en règle générale, des plus mauvaises au XIXe siècle[7]. Les ouvriers connaissaient généralement les conditions misérables des ghettos et bidonvilles, ayant à peine de quoi vivre, sans couverture sociale, et étaient menacés par le chômage[8]. Déjà quelques années avant la révolution de Mars se produisaient régulièrement des émeutes locales contre les « barons d'industrie ». Par exemple, la « révolte des tisseurs[citation 1] » de juin 1844 en Silésie, une révolte de la faim des tisserands de Bielawa et de Pieszyce, est considérée comme le premier soulèvement public significatif du prolétariat allemand, même s'il fut réprimé en quelques jours par les troupes prussiennes[5].
La bourgeoisie aisée se vit, elle aussi, de plus en plus freinée dans son développement. En raison de la politique douanière des principautés, les possibilités de libre-échange étaient très limitées. Dans les États allemands également, les aspirations à une libéralisation de l'économie et du commerce se firent entendre de plus en plus dans les premières décennies du XIXe siècle. Le 22 mars 1833 fut fondé le Zollverein qui facilita le commerce entre les pays allemands. Cependant, à la fin des années 1830, l'essor économique global[9] ne profita que peu aux couches de population les plus pauvres[10].
Contexte politique |
Congrès de Vienne et début de la Restauration |
La révolution de Mars avait pour moteur l'opposition à la politique de restauration en vigueur depuis le congrès de Vienne de 1815, aux traités qui ont suivi, tels le recès de Francfort en 1819 et aux décrets de Karlsbad[11] ; restauration principalement incarnée par le diplomate et chancelier autrichien réactionnaire Klemens Wenzel von Metternich[12].
Cette politique de restauration avait été décidée par la plupart des États européens lors du congrès de Vienne le 9 juin 1815[13](juste avant la défaite de la bataille de Waterloo, fatale à Napoléon Bonaparte le 18 juin 1815), et devait restaurer les rapports politiques de l'Ancien Régime en Europe, tels qu'ils étaient avant la Révolution française de 1789. Cela impliquait la prédominance de la noblesse, le rétablissement de ses privilèges, et le maintien d'un éclatement en différents États germaniques, malgré les désirs d'unification apparus durant la lutte contre l'armée napoléonienne[14],[15].
Sur le plan de la politique intérieure, dans le cadre de la restauration, les exigences de réformes libérales ou d'unification nationale furent étouffées, les mesures de censure renforcées et la liberté de la presse très diminuée[3]. Ainsi en décembre 1835, les œuvres de la Jeune-Allemagne, un groupe de jeunes écrivains révolutionnaires, furent censurées ou interdites[16]. D'autres poètes sociocritiques ou nationalistes furent censurés, et pour certains contraints à l'exil, notamment vers la France ou la Suisse[16]. Ce fut le cas par exemple d'Heinrich Heine, de Georg Herwegh, de Georg Büchner (auteur du libelle « Le Messager des campagnes hessoises » (Der Hessische Landbote) dont le mot d'ordre était « Paix aux chaumières, guerre aux palais ! » (Friede den Hütten, Krieg den Palästen!)[17],[16], ou encore d'August Heinrich Hoffmann von Fallersleben (qui écrivit le Deutschlandlied).
Fête de la Wartbourg et décrets de Karlsbad |
Les Burschenschaften (sociétés étudiantes) de cette époque exigeaient l'unité nationale ainsi que la reconnaissance de droits démocratiques. Le 18 octobre 1817, elles se réunirent massivement à proximité du château de la Wartbourg à l'occasion du quatrième anniversaire de la Bataille de Leipzig et du 300e anniversaire de la réforme protestante de Martin Luther. C'est pendant cette fête de la Wartbourg qu'elles défendirent avec véhémence leur revendication d'unité allemande, recourant à des autodafés : des participants brûlèrent des œuvres d'écrivains réactionnaires qualifiées d'anti-allemandes, comme la Deutsche Geschichte d'August von Kotzebue, le Code Napoléon, ou encore des œuvres d'auteurs juifs comme la Germanomanie de Saul Ascher, une condamnation du nationalisme allemand[18],[19],[20].
Heinrich Heine, aux opinions démocrates, était néanmoins réservé à l'égard du nationalisme exacerbé des Burschenschaften, et énonça à cette époque une formule prophétique et devenue célèbre « Ce n'était qu'un début. Là où on brûle des livres, on finit par brûler des hommes[citation 2]. » Celle-ci faisait certes littéralement référence à la Reconquista espagnole dans sa pièce de théâtre Almansor, mais elle est également empreinte d'une expérience contemporaine, Heine ayant toujours été un poète critique à l'égard de son temps[21].
Les frasques de la fête de la Wartbourg attirèrent l'attention des autorités sur les Burschenschaften qui subirent bientôt une répression grandissante. En 1819, cette répression prit une forme légale : les décrets de Karlsbad, en réaction à l'assassinat du poète August von Kotzebue par Karl Ludwig Sand, un nationaliste fanatique, membre d'une Burschenchaft[22]. Malgré l'interdiction et les persécutions, les membres des Burschenschaften restèrent souvent actifs dans la clandestinité. Des organisations se camouflèrent sous une apparence apolitique, comme le mouvement gymnique allemand (Turnbewegung) du « Turnvater Jahn », où on continuait à la fois à développer des idées libérales inspirées des romantiques, mais aussi culturelles et nationales qui portaient cependant des aspects contraires aux idées émancipatrices et à celles des Lumières[23]. Ainsi, l'antisémitisme était très répandu dans ces groupes comme dans l'ensemble des Burschenschaften, signes précurseurs des concepts antisémites à base de préjugés racistes biologiques de la fin des années 1870, auxquels Friedrich Ludwig Jahn se reconnaissait ouvert. Pendant le Vormärz, l'expression de cette haine des juifs se matérialisa par les émeutes Hep-Hep de 1819. Elles commencèrent à Wurtzbourg, mais s'étendirent rapidement à presque tous les États allemands. Ces émeutes dirigées contre l'émancipation des Juifs en général et contre leur égalité économique en particulier, dégénérèrent en bien des endroits en pogrom[24].
Révolution de 1830 |
En France, la Révolution de Juillet de 1830, pendant laquelle la Maison de Bourbon représentée par Charles X fut renversée, et au cours de laquelle les forces libérales instituèrent le « roi des Français » (et non « roi de France ») Louis-Philippe Ier, donna aussi un élan aux forces libérales en Allemagne et dans d'autres régions d'Europe[25]. Cela provoqua dès 1830 des soulèvements dans plusieurs principautés allemandes, comme à Brunswick, en Hesse-Cassel, dans le Royaume de Saxe et à Hanovre, et conduisit à l'adoption de constitutions[26].
Il y eut également des soulèvements en 1830 dans les États italiens ainsi que dans les provinces polonaises de l'Autriche, de la Prusse et de la Russie (Royaume du Congrès) dont le but était l'autonomie d'un État national. Dans le Royaume des Pays-Bas, la Révolution belge mena au détachement des provinces du sud et à la création d'un État belge indépendant prenant la forme d'une monarchie constitutionnelle[27].
Fête de Hambach et attaque de la Garde de Francfort |
Dans l'ensemble, le système de Metternich se maintint néanmoins, même si des fissures apparurent dans de nombreux endroits. Ainsi, les décrets de Karlsbad n'empêchèrent pas des rassemblements spectaculaires dans la lignée de la fête de la Wartbourg, comme la fête de Hambach en 1832, pendant laquelle on arbora des drapeaux républicains tricolores, noir, rouge et or pourtant interdits (comme déjà en 1817 lors de la fête de la Wartbourg[18])[28].
L'attaque de la Garde de Francfort[citation 3] du 3 avril 1833 fut la première tentative, menée par une cinquantaine d'étudiants, de déclencher une révolution dans toute l'Allemagne. L'action visait le siège du Bundestag situé à l'époque à Francfort-sur-le-Main et considéré par les démocrates comme un instrument de la politique de restauration. Après la neutralisation des deux postes de police de Francfort, les insurgés voulurent capturer les envoyés des princes et ainsi favoriser le soulèvement de toute l'Allemagne. Révélée avant même de commencer, l'action tourna court, dès le début, après un échange de coups de feu qui fit quelques morts et blessés[28].
En Italie, en 1831, le révolutionnaire et patriote Giuseppe Mazzini fonda la société secrète Giovine Italia (Jeune Italie). Elle donna naissance à d'autres sociétés en Europe comme Junges Deutschland (Jeune Allemagne) ou « Jeune Pologne ». Ensemble elles formèrent en 1834 la société secrète supranationale Giovine Europa (Jeune Europe)[29].
En 1834, Georg Büchner et Friedrich Ludwig Weidig diffusèrent clandestinement le libelle Le Messager des campagnes hessoises (Der Hessische Landbote)[30] avec le mot d'ordre « Paix aux chaumières, guerre aux palais ! » (Friede den Hütten, Krieg den Palästen!) dans le grand-duché de Hesse[16]. En 1837, la lettre de protestation solennelle des Sept de Göttingen (un groupe de professeurs d'université libéraux notables, parmi lesquels on comptait les frères Grimm) contre la révocation de la constitution du Royaume de Hanovre, trouva un écho dans toute la Confédération germanique. Les professeurs furent renvoyés et certains, expulsés du pays[31],[32].
Guerre de Sonderbund et veille de la révolution de Mars |
En 1847, la guerre du Sonderbund éclata en Suisse qui était une confédération d'États peu solidaires et politiquement très hétérogènes, avant que la constitution fédérale de 1848 la transforme en un État fédéral libéral[33],[34].
Les libéraux et démocrates des États allemands aspiraient à la mise en place de libertés politiques par le biais de réformes démocratiques ainsi qu'à l'unité nationale des principautés au sein de la Confédération germanique. Ils soutenaient particulièrement les idées du libéralisme[35],[36].
Déroulement |
Prémices |
Le facteur déclencheur de la révolution de Mars fut la révolution de Février en France, à partir de laquelle l'étincelle révolutionnaire se propagea rapidement aux États allemands limitrophes[37],[3]. Les événements aboutirent en France à la destitution du roi Louis-Philippe Ier qui s'éloignait de plus en plus des idées libérales et à la proclamation de la Deuxième République, ce qui amorça une agitation révolutionnaire qui tint le continent en haleine pendant plus d'un an et demi[11]. Des mouvements analogues se développèrent dans le Pays de Bade, le Royaume de Prusse, l'Empire d'Autriche, l'Italie du Nord, la Hongrie, le Royaume de Bavière et la Saxe, tandis que se produisaient des soulèvements et des rassemblements revendicatifs dans d'autres États et principautés. À la sortie de l'assemblée populaire de Mannheim du 27 février 1848, pendant laquelle les « revendications de Mars[citation 4] » furent formulées pour la première fois, les principales revendications de la révolution en Allemagne consistèrent en « 1. Armement du peuple avec libre élection des officiers, 2. Liberté de la presse inconditionnelle, 3. Cour d'assises selon l'exemple anglais, 4. Établissement immédiat d'un parlement allemand[38],[39]. » Les droits fondamentaux avec les « exigences du peuple[citation 5] » furent exigés durant rassemblement d'Offenburg du 12 septembre, où les politiciens badois radicaux-démocrates s'assemblèrent[40]. Le 10 octobre suivant, lors de la réunion d'Heppenheim, les libéraux modérés rédigèrent leur programme politique[41].
Dans certains pays de la Confédération germanique, comme les royaumes de Royaume de Wurtemberg et d'Hanovre, ou le grand-duché de Hesse, les princes cédèrent rapidement au profit de ministères de Mars d'orientation libérale, qui répondirent en partie aux exigences révolutionnaires, en instituant notamment des cours d'assises, en abolissant la censure de la presse et en libérant les paysans[citation 6],[42]. Cependant, il ne s'agissait souvent que de simples promesses. Ces concessions rapides aux révolutionnaires permirent à ces pays de connaître des années 1848 et 1849 relativement pacifiques[43],[44].
Au Danemark également, le roi Frédéric VII céda sans qu'aucun coup de feu ne soit tiré[45].
Dès mai et juin 1848, les maisons princières affirmèrent de plus belle leur volonté de restauration, si bien que les révolutionnaires des pays de la Confédération germanique se raidirent dans la défensive[46]. Au même moment, la défaite à Paris des insurgés des journées de Juin constitua une victoire décisive pour la contre-révolution. Elle influença fortement la suite de la révolution de Février en France ainsi que les événements révolutionnaires dans toute l'Europe[47]. Ce soulèvement des ouvriers parisiens en juin 1848 marqua aussi historiquement la scission entre le prolétariat et la bourgeoisie révolutionnaire[46].
Repères chronologiques |
Il est difficile d'établir un déroulement chronologique de la révolution dans son ensemble, car les événements ne peuvent pas toujours être mis en relation de manière univoque[48].
Fin |
La prise de Rastatt par les troupes prussiennes, le 23 juillet 1849 marque la fin de la révolution badoise et est traditionnellement considérée comme étant le point final de la révolution allemande de 1848-49[49].
Théâtres de la révolution de Mars |
Grand-duché de Bade |
Le 27 février 1848, une assemblée populaire se forma à Mannheim qui, par ses revendications, posait les bases de la révolution à venir[50]. Parmi les révolutionnaires badois, c'est l'aile radicale-démocrate, assez représentative du mouvement, qui réclamait les changements les plus extrêmes[51].
Menés par les avocats Friedrich Hecker et Gustav Struve, les révolutionnaires exigèrent entre autres la création d'une souveraineté populaire de fait, l'abolition des privilèges, la fin de la censure, l'armement du peuple et un impôt sur le revenu progressif ; exigences qui seront reprises ailleurs par tous les mouvements sociaux-révolutionnaires et socialistes[38]. Le 1er mars, la Ständehaus du parlement de Bade à Karlsruhe fut occupée[52].
Struve et Hecker, en tant que représentants de l'aile gauche au pré-parlement de Francfort (qui devait préparer l'élection d'un parlement chargé de la rédaction d'une constitution) avaient exigé une république allemande fédérative qui conduirait à des changements politiques et sociaux. Un programme représentatif publié par Struve fut cependant refusé par la majorité du pré-parlement[53].
Le 2 avril, Hecker et Struve prirent la route en essayant de promouvoir leurs idées en chemin. En Allemagne du Sud-ouest, leur action fut appelée « soulèvement d'Hecker »[citation 7]. Ainsi à Constance, ils prétendirent avoir proclamé la république le 12 avril 1848 avec le professeur de faculté de Bonn Gottfried Kinkel et d'autres sympathisants ; cependant, aucun des trois journaux de Constance ne mentionna le discours en question. Le cortège d'Hecker[citation 8], composé d'environ 1 200 hommes, se mit en route vers le fossé rhénan[54], où il voulut fusionner avec un cortège, dit « Légion démocratique allemande[citation 9] », mené par le poète révolutionnaire de gauche Georg Herwegh et sa femme Emma qui jouait le rôle d'éclaireuse ; tout cela en vue de marcher sur la capitale badoise Karlsruhe et ainsi d'étendre à partir de là la république à tout le duché de Bade. Mais les deux groupes furent en peu de temps vaincus et dispersés par l'armée régulière : celui d'Hecker le 20 avril 1848 dans un combat à Kandern et celui de Herwegh, une semaine plus tard, à Dossenbach[53]. Hecker parvint à s'exiler aux États-Unis[55],[56].
En septembre 1848, à Lörrach, une nouvelle insurrection menée par Gustav Struve échoua également. Avec ses partisans, il tenta de proclamer la république le 21 septembre[57], mais fut défait dès le 24[58]. La suite du développement révolutionnaire du grand-duché de Bade se réduisit aux algarades au parlement de Francfort. Struve fut arrêté[52] et condamné à une peine d'emprisonnement avec quelques autres révolutionnaires lors d'un procès pour haute trahison, et ne fut libéré que lors des troubles de mai 1849.
En mai 1849, après l'échec du parlement à Francfort, il y eut de nouveaux soulèvements dans des États allemands, dont le grand-duché de Bade, appelés les « soulèvements de mai ». Les démocrates voulaient ainsi obtenir par la force, dans une constitution impériale, la reconnaissance de leurs gouvernements respectifs[59].
Le 11 mai, la garnison badoise se mutina dans la forteresse de Rastatt[60]. Peu de temps après, le grand-duc Léopold Ier de Bade fuit en Alsace-Lorraine[59]. Le 1er juin 1849, un gouvernement provisoire dirigé par le politicien libéral Lorenz Brentano prit le pouvoir[61]. Cela mena à des combats contre des troupes de la confédération et l'armée prussienne sous les ordres du « prince de la mitraille[citation 10],[62] » Guillaume de Prusse, le futur empereur allemand Guillaume Ier. L'armée révolutionnaire badoise céda devant la supériorité des troupes prussiennes[49],[63].
En juin 1849, les révolutionnaires badois étaient sous les ordres du général révolutionnaire polonais Ludwik Mierosławski, un stratège et un soldat expérimenté de la révolution. Au cours de la révolution de Mars, il avait déjà conduit des soulèvements en Pologne dont, en 1848, le soulèvement de la Posnanie contre la domination prussienne (voir ci-dessous). Mierosławski abandonna cependant dès le 1er juillet 1849 le commandement des troupes révolutionnaires badoises ; il était déçu par l'attitude frileuse du gouvernement de Brentano, qui misait sur des négociations et retardait l'armement général du peuple. Cela minant le moral des troupes, Mierosławski conclut que la situation militaire ne permettrait pas la victoire de la république badoise[64],[65].
Aux côtés des révolutionnaires badois, le socialiste Friedrich Engels participa aussi aux combats. En 1848-1849, Engels était rédacteur de la Nouvelle Gazette rhénane publiée par Karl Marx, ainsi qu'un observateur critique et sympathisant de la révolution[66]. Un an auparavant, en février 1848, Engels avait publié avec Karl Marx le Manifeste du Parti communiste. Wilhelm Liebknecht, le futur cofondateur du Parti ouvrier social-démocrate (SDAP), était également adjudant de Gustav Struve et actif aux côtés des révolutionnaires[67].
Le 23 juillet 1849, la forteresse de Rastatt tomba après trois semaines de siège, ce qui mit un terme à la révolution badoise[49]. 23 révolutionnaires furent exécutés, d'autres comme Gustav Struve, Carl Schurz ou Lorenz Brentano purent s'exiler. En tout, environ 80 000 Badois quittèrent leur pays après la révolution, c'est-à-dire environ 5 % de la population[49].
La caractéristique majeure de la révolution badoise, par opposition aux autres soulèvements de la Confédération germanique, est la fermeté avec laquelle la revendication d'une république démocratique y fut défendue[68]. En effet, dans les commissions et les parlements révolutionnaires des autres principautés de la confédération germanique, une monarchie constitutionnelle héréditaire fut privilégiée[69].
Territoires sous domination prussienne |
Prusse |
Sous la pression des événements révolutionnaires ayant lieu à Berlin depuis le 6 mars 1848, le roi Frédéric-Guillaume IV de Prusse fit des concessions dans un premier temps. Il consentit à la mise en place d'un Landtag, à introduire la liberté de la presse, à supprimer les barrières douanières et à réformer la Confédération germanique. Le 18 mars, après la lecture de la loi en question, deux tirs échappèrent des rangs de l'armée et dispersèrent des milliers de citoyens qui étaient réunis sur la place du château. Cela provoqua d'abord un mouvement de panique puis des combats sur les barricades et dans les rues de Berlin entre les révolutionnaires et l'armée régulière prussienne ; les rebelles réussirent dans un premier temps à l'emporter. Le 19 mars, les troupes furent retirées de Berlin sur l'ordre du roi. Ces combats eurent pour conséquence plusieurs centaines de morts et plus d'un millier de blessés, des deux côtés[70],[71],[72].
Au vu du nombre des victimes, le roi honora les révolutionnaires tués. Le 19 mars, il s'inclina devant les corps exposés des « victimes de Mars » (Märzgefallenen), avant qu'ils ne soient enterrés le 22 mars au « cimetière des victimes de Mars[citation 11] », et il se montra en public avec un bandeau aux couleurs de la révolution (noir, rouge et or). Cette manœuvre servit surtout à gagner du temps : en utilisant le vocabulaire des révolutionnaires et en allant dans leurs sens, il s'assurait de calmer une révolution aux conséquences incertaines.
Dans un appel à « Mon peuple et la nation allemande », il promit la dissolution de la Prusse dans l'Allemagne[citation 12]. Le 29 mars 1848, un ministère de Mars libéral fut mis en place, qui ne put cependant pas s'imposer face à la noblesse et à l'armée. Le 20 juin 1848, le premier ministre Ludolf Camphausen présenta sa démission. Son ministre des finances David Hansemann fut alors chargé de former un nouveau gouvernement dont le ministre-président était Rudolf von Auerswald. Ce gouvernement dura jusqu'au 21 septembre, date à laquelle fut appelé Ernst von Pfuel, militaire de formation, à la tête du gouvernement[73].
Fin mai 1848, lorsque les troubles se furent un peu calmés, le roi entreprit un revirement réactionnaire. Le 14 juin, avec « l'attaque de l'arsenal[citation 13] », le bouillonnement révolutionnaire reprit : le peuple prit les armes de l'arsenal[74]. Le 2 novembre 1848, le général Frédéric Guillaume comte de Brandebourg fut nommé ministre-président de Prusse[75],[76]. Une semaine plus tard, les troupes royales entrèrent à Berlin[77]. Le député conservateur Otto von Bismarck se trouvait parmi les personnes qui participèrent activement à cette contre-révolution ; il deviendra plus tard ministre-président de Prusse, puis chancelier impérial de l'Empire allemand, fondé en 1871[78]. Les négociations de l'assemblée nationale prussienne, menées depuis le 22 mai pour l'obtention d'une constitution (promise sans cesse depuis 1815 par Frédéric-Guillaume IV de Prusse et ses successeurs), furent infructueuses.
L'ébauche de constitution présentée en juillet 1848, la Charte Waldeck, qui prévoyait quelques réformes libérales-démocrates, fut rejetée aussi bien par les députés conservateurs que par le roi[79].
Les 10 et 15 novembre 1848, le roi fit disperser par l'armée l'assemblée nationale prussienne[77]. Le 5 décembre, il ordonna la dissolution de l'assemblée nationale, qu'il avait fait déplacer à Brandebourg et accorda le jour-même une constitution, bien en dessous des revendications de la révolution de Mars[75],[80]. Le pouvoir royal restait ainsi intact. Le roi s'octroya un droit de veto suspensif contre chaque décision du Landtag prussien, aussi bien que le droit de dissoudre le parlement à tout moment. Le gouvernement prussien[citation 14] n'était pas responsable devant le parlement, mais seulement devant le roi. Néanmoins, la constitution dite « octroyée » contenait quelques concessions libérales tirées de la Charte Waldeck, qui furent cependant modifiées dans les mois suivants[76],[81].
À la fin du mois de mai 1849, l'assemblée nationale fut remplacée par la deuxième chambre des députés prussienne. Un système des trois classes fut mis en place, afin d'assurer la suprématie des grands propriétaires. Ce droit de vote inégalitaire resta en vigueur jusqu'en 1918[82],[83].
Cette réaction aboutit avant tout à des mouvements de protestation dans les provinces occidentales de Prusse[59]. Dans les anciennes circonscriptions à dominante libérale ou catholique de la Rhénanie et de la Westphalie, de multiples députés démocrates furent élus à la chambre des députés prussienne. Les troupes du roi avaient cependant, au plus tard en mai 1849, repris le dessus sur la révolution, avec l'échec du soulèvement d'Iserlohn en Westphalie et de celui de l'attaque de l'arsenal de Prüm en Rhénanie[84].
Posnanie et Pologne |
Le grand-duché de Posnanie, la région la plus peuplée de Pologne, était en 1848 une province prussienne. L'ancien État lituano-polonais était déjà au XVIIIe siècle le jouet politique des grandes puissances européennes. Après plusieurs partitions entre la Russie, la Prusse et l'Autriche, l'État cessa d'exister en 1795[85].
Au début du XIXe siècle, il n'y eut un État polonais qu'entre 1807 et 1815, en tant qu'État vassal sous protection napoléonienne : le Duché de Varsovie du duc Frédéric-Auguste Ier de Saxe, qui était également roi de Saxe. Après la victoire des alliés (Russie, Prusse et Autriche) sur Napoléon Ier, le duché de Varsovie fut partagé en 1815 entre la Russie et la Prusse au congrès de Vienne, mais on reconnut une obligation de garantir l'identité polonaise des habitants.
Par la suite, de plus en plus de conjurations se formèrent dans les régions polonaises de Russie, de Prusse et d'Autriche, dans le but d'établir de nouveau une Pologne autonome. À la suite de la révolution de juillet de 1830 en France, il y eut une insurrection dans la partie russe, qui fut cependant un échec[34].
En 1846, un soulèvement polonais préparé secrètement dans le grand-duché de Posnanie fut découvert et étouffé dans l'œuf[34]. Son meneur, le révolutionnaire polonais Ludwik Mierosławski, fut fait prisonnier et condamné à mort en décembre 1847 au procès polonais[citation 15] de Berlin, mais ensuite gracié avec sept autres personnes le 11 mars 1848, et sa peine fut convertie en détention à vie[86].
Après les combats des 18 et 19 mars 1848 à Berlin, quatre-vingt-dix révolutionnaires polonais, dont Mierosławski et Karol Libelt, furent relâchés de la prison de Moabit[87]. Au premier stade de la révolution de Mars, qui fut ressentie en Europe comme le Printemps des peuples, une attitude pro-polonaise prédominait encore parmi les révolutionnaires, qui saluait et encourageait les insurrections en Posnanie[88]. Peu après sa libération, en avril et mai 1848, Mierosławski se plaça à la tête du soulèvement de la Posnanie contre la domination prussienne, qui était à présent ressentie comme étrangère[65]. Le soulèvement se dirigea contre l'intégration des régions majoritairement polonaises aux votes pour l'élection du parlement de Francfort, et ainsi contre l'incorporation d'une partie de la Pologne au sein d'un État national allemand. Un objectif plus lointain était la réunification de toute la Pologne[89]. À cet égard, la révolution en Posnanie visait également la libération du royaume de Pologne, nommé Royaume du Congrès, qui était depuis 1831 une province sous la domination indirecte de la Russie[90].
Au cours du déroulement de la révolution en Prusse, où les forces conservatrices avaient de nouveau progressivement gagné une position déterminante, l'enthousiasme initial pour la Pologne se mua en une position nationaliste[88]. En outre, le roi Frédéric-Guillaume IV de Prusse ne voulait pas risquer une guerre avec la Russie à cause du soulèvement en Posnanie[91]. Le 9 mai 1848, l'insurrection en Posnanie fut écrasée les troupes prussiennes, largement supérieures, et Mierosławski fut de nouveau arrêté. Sur intervention de la France révolutionnaire, il fut amnistié peu après et expulsé en France — jusqu'à ce que, en juin 1849, il soit appelé par les révolutionnaires badois qui voulaient le placer à la tête de leur armée révolutionnaire (voir ci-dessus)[86].
Après la révolution de 1848, les Polonais de Prusse reconnurent qu'un soulèvement violent ne conduirait jamais au succès. Comme méthode pour maintenir leur cohésion nationale et en parade à la politique de germanisation de la Prusse, le « travail organique[citation 16] » prit une importance toujours grandissante au sein du désormais État prussien constitutionnel[92].
Territoires sous domination autrichienne |
Autriche |
Dans l'Empire des Habsbourg et l'État-multination de l'Empire d'Autriche, la monarchie ne fut pas menacée uniquement par de violents soulèvements en Autriche, c'est-à-dire l'État central de l'Empire, mais aussi par d'autres troubles révolutionnaires, comme en Bohême, en Hongrie ou en Italie du Nord[93]. Le Royaume de Sardaigne soutenait militairement les révolutionnaires. Alors que les soulèvements hongrois, bohémiens et italiens visaient entre autres à l'indépendance vis-à-vis de la domination autrichienne, la révolution autrichienne avait pour objectif un changement libéral et démocratique de la politique du gouvernement, et la fin de la Restauration[94],[95],[96].
1847-1848 fut pour l'Autriche un hiver de famine pour les plus défavorisés[97]. Dans les milieux ouvriers également, la colère contre le système politique devint très forte. Des œuvres comme Nouveaux esclaves[citation 17] d'Alfred Meissner ou Pourquoi nous sommes pauvres[citation 18], ainsi qu'un poème de Karl Beck donnent une image parlante de la colère et du désespoir qui régnaient dans la population.
Finalement, la révolution éclata en Autriche le 13 mars 1848 avec l'attaque de la Ständehaus à Vienne et des attentats de révolutionnaires socialistes contre des magasins et des usines dans les faubourgs[98]. La chanson Ce qui nous vient d'en haut[citation 19], où « haut (Höh) » désigne la police et les casernes, devint la chanson de la révolution. Elle est chantée aujourd'hui encore par diverses fraternités d'étudiants pour commémorer la participation de la légion académique. Avant l'attaque de la Ständehaus, la colère contre le système policier et les revendications des révolutionnaires pour une transformation constitutionnelle de la monarchie et la mise en place d'une constitution dans les pays autrichiens avaient déjà été exprimées le 3 mars 1848 dans un discours rédigé par le chef nationaliste hongrois Lajos Kossuth[50].
Le soir du 13 mars, le chancelier Metternich, âgé de 74 ans, détesté par les socialistes et les réformateurs, démissionna[93] et s'enfuit en Angleterre. Cet événement inspira notamment Hermann Rollett, qui écrivit le poème Le Tilleul de Metternich[citation 20].
Le 14 mars, l'empereur Ferdinand Ier d'Autriche fit ses premières concessions : il consentit à l'établissement d'une garde nationale et leva la censure. Le lendemain, il précisa à ce sujet qu'il avait « octroyé une totale liberté de la presse[citation 21] » et il promit également par décret une constitution[99].
Le 17 mars, le premier gouvernement fut formé ; son ministre de l'intérieur Franz von Pillersdorf esquissa une constitution à laquelle on donna son nom par la suite[citation 22], et qui fut rendue publique pour l'anniversaire de l'empereur, le 25 avril 1848[93]. Cette constitution n'allait pas assez loin selon les révolutionnaires. Le bicamérisme et le système électoral pour l'élection du Reichstag publié le 9 mai provoquèrent notamment l'indignation, et menèrent ainsi à de nouvelles perturbations (révolution de mai). En raison de la pétition du 15 mai, cette constitution fut réaménagée : le Reichstag ne devait plus être constitué que d'une seule chambre et celle-ci devait être déclarée « constituante », c'est-à-dire qu'elle avait la charge d'établir une constitution définitive[100],[101]. La constitution de Pillersdorf resta en vigueur de façon provisoire. L'empereur, dépassé par les émeutes qui s'intensifiaient, partit se mettre en sécurité à Innsbruck[100],[93].
Le 22 juillet 1848, le Reichstag constituant autrichien, composé de 383 déléguées venus d'Autriche et des pays slaves, fut ouvert par l'archiduc Jean-Baptiste d'Autriche. On y décida, entre autres, la libération des paysans de la féodalité le 7 septembre[102],[103].
Les évènements qui eurent lieu en Hongrie à partir du 12 septembre 1848, pendant lesquels le soulèvement hongrois dirigé par Lajos Kossuth mena à un affrontement contre les troupes impériales puis par la suite à l'assassinat du ministre de la Guerre autrichien Theodor Baillet von Latour le 6 octobre, provoquèrent à Vienne la troisième phase de la révolution autrichienne, appelée insurrection viennoise d'octobre 1848. Au cours de son développement, les citoyens, étudiants et travailleurs viennois parvinrent à prendre la capitale après que les troupes du gouvernement s'en furent enfuies. Mais les révolutionnaires ne purent la garder en leur pouvoir que pendant une courte période[100],[96].
Le 23 octobre, Vienne fut encerclée par des troupes contre-révolutionnaires venant de Croatie, sous les ordres du Ban Josip Jelačić, et de Prague, sous les ordres du maréchal Alfred de Windisch-Graetz. Malgré la résistance farouche quoique désespérée de la population viennoise, la ville fut reprise par les troupes impériales en une semaine. quelque 2 000 insurgés furent tués. D'autres meneurs de l'insurrection viennoise d'octobre furent condamnés à mort ou à de longues peines de prison[104],[79].
Parmi les victimes des exécutions sommaires, figure notamment le député populaire gauche-libéral et républicain du Parlement de Francfort, Robert Blum, qui fut exécuté le 9 novembre 1848 en dépit de son immunité diplomatique et fut ainsi élevé au rang des martyrs de la révolution[79]. Cet événement fut repris dans la Chanson de Robert Blum qui fut surtout chantée dans les États allemands en-dehors de l'Autriche.
Le 2 décembre 1848, il y eut en Autriche une passation du pouvoir impérial. Les événements révolutionnaires avaient mis en évidence les faiblesses de l'empereur Ferdinand Ier. À l'initiative du ministre-président autrichien, le maréchal-prince de Schwarzenberg, l'empereur Ferdinand abdiqua et céda le trône à son neveu âgé de 18 ans, qui prit pour nom d'empereur François-Joseph Ier d'Autriche[105].
C'est ainsi que la révolution en Autriche fut matée. La constitution élaborée en mars n'entra jamais en vigueur[79]. Cependant, les événements qui suivirent en Hongrie et en Italie demeurèrent un obstacle à la prétention de François-Joseph d'imposer son pouvoir dans l'ensemble de l'Empire des Habsbourg[106].
L'année 1848 fut marquée par l'abolition de courte durée de la censure. En conséquence, on publia une multitude d'œuvres, les magazines se multiplièrent puis disparurent et la culture écrite se modifia radicalement. La Presse libre ![citation 23] de Friedrich Gerhard, Le Censeur mort[citation 24] de Moritz Gottlieb Saphir, Police secrète[citation 25] de Ferdinand Sauter ou Chanson du censeur[citation 26] permettent de dresser un tableau de cette ambiance de renouveau. On critiqua aussi sévèrement le système existant. On en trouve des exemples dans certaines œuvres de Johann Nestroy comme Liberté à Krähwinkel[citation 27], dans les poèmes politiques d'Anastasius Grün ou dans les écrits de Grillparzer.
Bohême |
La Bohême fut également touchée par la vague révolutionnaire. Le 11 avril 1848, František Palacký, l'une des figures du nationalisme tchèque, refuse de s'associer aux révolutionnaires allemands dans une lettre adressée au Parlement de Francfort. Il adopte cette position au nom de l'austroslavisme, à savoir la création d'un État confédéral dont Vienne serait la capitale. Il écrit ainsi que « si l’Empire d’Autriche n’existait pas depuis longtemps, il faudrait l’inventer, dans l’intérêt même de l’Europe et dans celui de l’humanité »[107]. Puis, entre le 2 et le 12 juin se tint le congrès panslave auquel assistèrent 350 participants tchèques, polonais, moraves, croates, serbes et slovaques[108], sous la présidence de Palacký. Ils réclamèrent la conversion de la « Monarchie du Danube » en un État confédéral garantissant l'égalité des droits entre les peuples. La revendication d'un État national tchèque fut expressément rejetée, les Moraves (des Allemands) craignant de se retrouver en minorité face aux Tchèques ; à la place, ils demandèrent seulement des droits d'autonomie vis-à-vis du gouvernement central autrichien et refusaient l'intégration dans un État allemand[95]. L'empereur Ferdinand Ier d'Autriche refusa strictement chacune de ces revendications. Ainsi le 13 juin, les révolutionnaires tchèques commencèrent leur soulèvement à Prague contre la suprématie autrichienne. L'insurrection fut écrasée le 17 juin 1848 par les troupes autrichiennes menées par Alfred de Windisch-Graetz[109].
Hongrie |
En Hongrie, les nouvelles de la révolution à Vienne arrivèrent le 3 mars 1848. Lajos Kossuth fit alors une déclaration devant le parlement hongrois pour réaffirmer ses revendications libérales[110]. Le 14 mars 1848, une délégation hongroise se rendit à Vienne y transmettre ses souhaits[111]. Le lendemain, le Stadthalterbeirat (l'organe administratif suprême de la partie hongroise de l'empire d'Autriche), impressionné par 20 000 manifestants, satisfit les « douze points » de revendication des intellectuels hongrois radicaux rassemblés autour de Sándor Petőfi (notamment un ministère et un parlement hongrois indépendants de Vienne, le départ de toutes les troupes autrichiennes de Hongrie, la mise en place d'une armée nationale hongroise et la création d'une banque nationale) et fit ainsi réellement du Royaume de Hongrie un État indépendant[71]. Lajos Kossuth succéda le 12 septembre 1848 au ministre-président libéral Lajos Batthyány. Les révolutionnaires hongrois empêchèrent, à la suite des événements révolutionnaires autrichiens, l'empereur Ferdinand Ier d'être reconnu roi de Hongrie[96].
Fin août, Josip Jelačić fut nommé gouverneur de Croatie. Le 11 septembre, il déclara la guerre à la Hongrie. Le 29, ses troupes furent repoussées à Pákozd par les Hongrois[112].
Le décret impérial octroyant la constitution de Mars pour la Hongrie comme pour l'Autriche déboucha le 7 mars 1849 sur un soulèvement pour l'indépendance[113]. Afin d'écraser l'insurrection, l'armée impériale, menée par Alfred de Windisch-Graetz, marcha sur la Hongrie. Mais, devant l'armée révolutionnaire renforcée par des corps franc et des émigrants polonais, elle se retira le 10 avril 1849.
Le 14 avril 1849, la Diète de Hongrie annonça son indépendance vis-à-vis de la maison de Habsbourg-Lorraine et proclama la république[114]. Lajos Kossuth fut alors nommé régent et investi des pleins pouvoirs[115].
Cependant, les autres États européens ne reconnurent pas l'indépendance de la Hongrie. Ainsi, les troupes russes prêtèrent assistance à l'armée autrichienne et, ensemble, elles écrasèrent la révolution hongroise[106]. Le 13 août 1849, les dernières unités hongroises capitulèrent à Világos[116]. Dans les semaines qui suivirent, plus de cent meneurs du soulèvement hongrois furent exécutés à Arad. Le 2 octobre, les derniers révolutionnaires hongrois capitulèrent face aux Autrichiens dans la forteresse de Komárom[117]. Le 6 octobre 1849, au jour anniversaire de la révolution d'octobre à Vienne, l'ancien ministre-président Batthyány fut exécuté à Pest[118],[117].
Lajos Kossuth, le représentant politique le plus important du mouvement de libération hongrois, s'exila en août 1849. Jusqu'à sa mort à Turin en 1894, il plaida pour l'indépendance de la Hongrie[115].
Provinces et États italiens |
Au XIXe siècle, après la fin de l'hégémonie napoléonienne en Europe et dans les principautés italiennes, l'Italie était composée de différents États. Les régions d'Italie du Nord (Lombardie, Émilie (duchés de Parme et Modène), Toscane et Venise) étaient sous domination autrichienne. À partir des années 1820 eurent lieu les soulèvements du Risorgimento, mouvement qui aspirait à un État unitaire italien et s'opposait ainsi à la domination autrichienne en Italie du Nord[96]. À la suite de la révolution de Juillet, dans les années 1830, plusieurs soulèvements furent initiés dans différentes régions italiennes par des groupes clandestins comme ceux gravitant autour des groupes radicaux-démocrates partisans du Risorgimento de Giuseppe Mazzini et Giuseppe Garibaldi ; cependant, tous échouèrent[29].
Giuseppe Mazzini (1805-1872), républicain combattant pour la réalisation de l'unité italienne.
Giuseppe Garibaldi (1807-1882), général et homme politique italien, l’un des « pères de la patrie » italienne.
Daniele Manin (1804-1857), un des acteurs du Risorgimento, président du gouvernement de la République de Saint-Marc.
À l'époque de la révolution de Mars, ces révolutionnaires jouèrent également un rôle important en Italie. Les thèses de Mazzini d'une Italie unie et libre au sein d'une Europe des peuples libérée des dynasties monarchiques, qui furent diffusées par le journal interdit Giovine Italia, n'eurent pas seulement une influence sur les révolutions des États italiens, mais furent aussi significatives pour les courants radicaux-démocrates dans de nombreuses autres régions d'Europe[29].
Les événements révolutionnaires de 1848 eurent un fort retentissement, non seulement en Italie du Nord, mais aussi dans d'autres provinces d'Italie. En janvier 1848 déjà, de premiers soulèvements de combattants pour la liberté eurent lieu en Sicile, à Milan, à Brescia et à Padoue contre la suprématie des Bourbons au sud et des Autrichiens au nord, qui s'intensifièrent le 17 mars 1848 à Venise et à Milan le 18. Les combats durèrent cinq jours dans la capitale lombarde. Finalement, les révolutionnaires déclarèrent l'indépendance de la Lombardie vis-à-vis de l'Autriche, et son rattachement au royaume de Sardaigne. Cette situation mena à la guerre entre le royaume de Sardaigne et l'Autriche[119].
Le 4 mars 1848, le roi Charles-Albert de Sardaigne avait déjà concédé dans son État une constitution représentative d'inspiration française, avec laquelle il introduisit une monarchie constitutionnelle, de façon à tirer profit de l'élan révolutionnaire pour unifier l'Italie sous son règne. Le 25 juillet 1848, malgré leurs premiers succès, les troupes du roi Charles-Albert furent défaites par les Autrichiens menés par le maréchal Joseph Radetzky lors de la bataille de Custoza[114],[96]. Selon l'armistice du 9 août, la Lombardie dut retourner à l'Autriche et seule Venise demeura insoumise. Les révolutionnaires italiens avaient déclaré la ville indépendante le 23 mars 1848 et proclamé la république de Saint-Marc, dirigée par Daniele Manin[119].
En février 1849, lorsque les insurgés fomentèrent un putsch contre le grand-duc Léopold II de Toscane de la maison des Habsbourg, la guerre fut relancée. Celle-ci tourna de nouveau en faveur des Autrichiens menés par Radetzky, lors de la bataille de Novare contre l'armée de Sardaigne[114],[113], forte de 100 000 hommes. Le mouvement d'unification italien fut ainsi momentanément anéanti, et la prédominance autrichienne en Italie du Nord fut, pour l'essentiel, de nouveau restaurée. Le roi Charles-Albert de Sardaigne abdiqua au profit de son fils, Victor-Emmanuel II de Savoie, et partit en exil au Portugal. Le nouveau roi conclut le 6 août à Milan un traité de paix avec l'Autriche[119].
Le 22 août 1849, la république révolutionnaire de Venise, dernier bastion des soulèvements italiens de 1848-1849, fut écrasée. Joseph Radetzky reçut de l'empereur la charge de gouverneur général, civil et militaire du royaume lombardo-vénitien[120].
Dans de nombreuses régions non-autrichiennes d'Italie, il y eut également en 1848-1849 des troubles révolutionnaires ; dans le royaume des Deux-Siciles par exemple, où les soulèvements de janvier 1848 poussèrent le roi Ferdinand II des Deux-Siciles à se doter d'une constitution le 10 février 1848[96].
En novembre 1848, le pape Pie IX fuit Rome et abandonna les États pontificaux devant les troubles qui s'intensifiaient. Il se replia à Gaeta, sur la côte du royaume des Deux-Siciles. Le 9 février 1849, les révolutionnaires romains menés par un triumvirat comprenant Giuseppe Mazzini proclamèrent la république dans les États pontificaux. Le 3 juillet 1849, la révolution romaine fut écrasée par les troupes françaises essentiellement, mais aussi espagnoles et autrichiennes[121] aux ordres des gouvernements de partis cléricaux, ce qui provoqua, cependant, des protestations en France, comme à Lyon. Par la suite, le pouvoir du comité exécutif fut transféré aux cardinaux. Ce n'est qu'en 1850 que le pape revint ; il annula une grande partie de ses réformes de 1846 et mit en place des mesures particulièrement réactionnaires dirigées contre les libéraux[96].
Bavière |
À partir du 4 mars 1848, il y eut en Bavière une recrudescence de troubles et de soulèvements à visée démocratique et libérale. Le roi Louis Ier de Bavière céda le 6 mars à certaines revendications des révolutionnaires et convoqua un cabinet plus libéral. Cependant, le roi se trouvait dans une situation délicate en raison d'une liaison non conforme à son rang avec la prétendue danseuse espagnole Lola Montez, qui lui faisait délaisser en partie les affaires d'État. Cette affaire exposa également Louis aux critiques des camps conservateur et catholique. Le 11 mars 1848, Lola Montez fut bannie de Munich. Il y eut de nouveaux troubles lorsque le bruit courut que la danseuse était de retour. À la suite de cela, le 20 mars, le roi abdiqua au profit de son fils Maximilien II de Bavière[122],[52].
Après l'échec de la Constitution de Francfort, survint en Rhénanie-Palatinat (qui appartenait autrefois à la Bavière) le soulèvement palatin de mai 1849. Au cours de ce soulèvement, la Rhénanie-Palatinat fut temporairement séparée du pouvoir bavarois. Cependant l'insurrection fut rapidement écrasée par l'armée prussienne[59].
Saxe |
Dans le Royaume de Saxe il y eut, à la suite des événements révolutionnaires, un changement de ministres et quelques réformes libérales[123]. Après que le roi de Saxe eut refusé la constitution de l'empire votée à Francfort le 28 mars 1849, il y eut un soulèvement à Dresde le 3 mai[124].
La figure centrale de ce soulèvement d'environ 12 000 insurgés fut l'anarchiste russe Mikhaïl Bakounine[124]. La Saxe était un bastion des démocrates radicaux, organisés au sein des « associations de Mars »[citation 28], le drapeau rouge flottait donc au côté de celui noir-rouge-or[125]. Comme le déclara Stephan Born, la lutte pour la constitution était secondaire, la souveraineté du peuple était plus importante à ses yeux[126].
Après que le roi eut fui la ville pour se réfugier dans la forteresse de Königstein, que les chambres fussent dissoutes et que les ministres se fussent retirés, les révolutionnaires formèrent un gouvernement provisoire. Les troupes saxonnes étaient pour la plus grande partie dans le Duché de Holstein. Le gouvernement saxon en fuite se tourna vers la Prusse pour obtenir de l'aide. Les troupes prussiennes et les unités militaires régulières saxonnes restées sur place écrasèrent l'insurrection le 9 mai 1849 après des combats de rue acharnés[124].
Holstein et Schleswig ; première guerre dano-allemande |
Fin mars 1848, un soulèvement allemand national se produisit dans les duchés nordiques de Schleswig et de Holstein, après que le roi Frédéric VII de Danemark, sous l'influence des nationaux-libéraux danois, eut voulu faire adopter une constitution commune au Royaume de Danemark et aux duchés de Schleswig et de Holstein. Ces duchés dépendaient à l'époque du roi danois en sa qualité de duc. Le Holstein, en tant que fief allemand, était cependant membre de la Confédération germanique depuis 1815, tandis que le Schleswig était un fief du Royaume de Danemark. Les nationaux-libéraux allemands craignirent l'incorporation du Schleswig dans le Danemark et formèrent un gouvernement provisoire. Il fut reconnu par le Bundestag de la Confédération germanique à Francfort avant même l'ouverture du Parlement de Francfort, toutefois l'absorption formelle du Schleswig dans la confédération fut évitée. À la suite de la formation du gouvernement nationaliste, la première guerre dano-allemande commença. À la demande de la confédération, les troupes prussiennes, dirigées par le Generalfeldmarschall Frédéric von Wrangel, parvinrent jusqu'au Jutland[127].
Cette manœuvre conduisit à une pression diplomatique sur la Prusse de la part de la Russie et du Royaume-Uni qui menacèrent de soutenir militairement le Danemark. La Prusse céda, et le roi Guillaume IV conclut l'armistice de Malmö avec le Danemark le 26 août 1848[128]. Le retrait des troupes de la Confédération germanique du Schleswig et du Holstein ainsi que la dissolution du gouvernement provisoire de Kiel y étaient prévus[129].
Cette action arbitraire de la Prusse conduisit à une crise au sein du Parlement de Francfort, qui avait commencé entretemps à siéger. Il devint clair que les moyens et l'influence du Parlement étaient minimes. Il était soumis au bon vouloir de la Prusse et de l'Autriche. Puisque le Parlement ne disposait d'aucun moyen de poursuivre la guerre contre le Danemark sans la Prusse, il se vit contraint d'approuver l'armistice le 16 septembre 1848[129]. Cette approbation eut pour conséquence de nouveaux troubles dans toute l'Allemagne, et plus particulièrement à Francfort. Puis, les troupes prussiennes et autrichiennes furent envoyées à Francfort contre ce qui dégénéra en combats de barricades. Lors de ces affrontements, il n'était plus tellement question du Schleswig-Holstein pour les insurgés, mais désormais, et de manière grandissante, de la défense de la révolution elle-même[130].
Le 25 mai 1849, le Danemark adopta une constitution établissant une monarchie constitutionnelle ainsi qu'un parlement à deux chambres élu au suffrage universel[34].
Le parlement de Francfort |
Formation du parlement |
Après que Friedrich Daniel Bassermann eut exigé le 12 février 1848 au parlement de Bade[citation 29] une représentation populaire au sein du Bundestag allemand[131], cette revendication se propagea au-delà du parlement et ainsi, le 5 mars, l'assemblée d'Heidelberg se conclut par une invitation à un pré-parlement[citation 30]constituant[39]. Après que le Bundestag de la Confédération germanique eut réagi à la pression publique en accordant la liberté de la presse, il essaya aussi de regagner sur-le-champ la souveraineté de la constitution et de la représentation parlementaire en reconnaissant la nécessité d'une révision de l'Acte confédéral allemand et de la mise en place du comité des dix-sept afin d'élaborer une nouvelle base à la constitution pour une Allemagne unie[131]. Le « pré-parlement », au sein duquel les libéraux avaient le dessus sur la gauche radicale, décida dans les premiers jours d'avril de travailler en commun avec la Confédération germanique et d'amorcer avec elle les élections pour une assemblée nationale constituante afin de donner un cadre juridique au mouvement[39]. Le comité des cinquante fut mis en place pour représenter le mouvement révolutionnaire auprès du Bundestag, et celui-ci appela les États de la Confédération germanique à mettre en œuvre l'élection de l'assemblée nationale. Elle se réunit pour la première fois le 18 mai 1848 en l'église Saint-Paul de Francfort et élut le libéral modéré Heinrich von Gagern comme président[37].
L'assemblée nationale établit le pouvoir central provisoire le 28 juin 1848, un gouvernement faisant office d'exécutif pour le parlement, et reprit le pouvoir étatique du Bundestag[132]. Le poste de chef de l'exécutif (régent impérial) fut attribué à Jean-Baptiste d'Autriche, connu pour ses opinions libérales. Le prince [[Charles de Linange (3e prince de Linange)|Charles de Linange]] fut nommé ministre-président de ce nouveau « ministère de l'empire »[133].
Structure et constitution du parlement |
Le parlement de Francfort devait préparer l'unité allemande et élaborer la constitution de l'empire[128]. Au sein de ce parlement, la plupart des membres étaient issus de la bourgeoisie : de grands propriétaires cultivés, des hauts fonctionnaires, des professeurs, des officiers, des magistrats, des avocats, etc. Pour cette raison, le parlement fut affublé de surnoms peu flatteurs par le peuple goguenard : « parlement des notables » ou « parlement des professeurs »[135],[136]. Dans le cadre du travail parlementaire, différents groupes parlementaires se formèrent bientôt. Ils furent baptisés en fonction des cafés où leurs membres se rencontraient après ou entre les séances pour convenir de leurs propositions et de leurs idées. À l'exception d'un grand groupe de députés qui n'appartenaient pas aux factions (33 % des députés en octobre 1848), deux ailes idéologiques et deux partis centristes se constituèrent. Leur répartition au sein du parlement était la suivante en octobre 1848 : la gauche démocratique[citation 31], le centre gauche, le centre droit et la droite conservatrice[137],[138]. La première, également appelée « die Ganzen » à l'époque, était composée des fractions du « Deutscher Hof » (8 %), du « Donnersberg » (7 %) auxquels se joignit en novembre le « Nürnberger Hof ». À partir de début 1849, elle fut globalement réunie au sein du « Centralmärzverein » (Association centrale de Mars) duquel naquit le parlement croupion allemand[citation 32]. Le deuxième groupe était celui de centre gauche parlementaire-libéral[citation 33], également appelée « die Halben ». Il était composé du « Württemberger Hof » (6 %) et du « Westendhall » (7 %), puis du « Augsburger Hof » (7 %) à partir de septembre. Il s'unit avec le centre droit en février 1849 au sein du groupe « Weidenbusch ». Le troisième groupe était le centre droit constitutionnel-libéral[citation 34] : à partir d'août, avec le détachement du « Landsberg » (6 %), il fut absorbé par la grande fraction « Casino » (21 %). Avec le centre gauche, il forma la « liberale Mitte » (centre libéral), connu sous le nom « die Halben ». Début 1849, une partie de la fraction Casino fusionna avec les fractions de droite pour former le « Pariser Hof ». Enfin, la droite conservatrice[citation 35] était principalement composée de conservateurs protestants. Ils siégèrent au départ dans la « Steinernen Haus », puis ils furent connus à partir de septembre comme la fraction du « Café Milani » (6 %).
Débats |
Le parlement de Francfort vit s'opposer les libéraux, « die Halben », et les démocrates, « die Ganzen ». Les premiers, plus modérés, acceptaient le compromis avec les monarques et privilégiaient la monarchie constitutionnelle héréditaire adoptant soit la solution petite-allemande (sans l'Autriche), soit la solution grande-allemande (avec l'Autriche) ; tandis que les seconds plus intransigeants donnaient plus d'importance à la souveraineté du peuple et donc à un régime fortement parlementaire. Les plus radicaux d'entre eux revendiquaient la mise en place d'une république. Les libéraux redoutaient dans ce cas une « république rouge », l'anarchie et une nouvelle terreur[139]. La solution grande-allemande avait les faveurs des démocrates[137].
Les groupes parlementaires débattaient vivement sur le droit de veto à accorder à l'exécutif sur les décisions du parlement. La majorité souhaitait un veto suspensif, mais certains libéraux comme Dahlmann souhaitaient attribuer un veto absolu pour faciliter l'acceptation du titre impérial au roi de Prusse. Un autre débat concernait le suffrage, les plus radicaux réclamaient le suffrage universel masculin direct secret, tandis que les libéraux, par peur des démagogues, lui préféraient un suffrage censitaire[140],[141],[142].
Le désaccord des députés paralysant le parlement, il vint à manquer un pouvoir exécutif capable de faire appliquer les décisions (qui échouaient souvent en raison des initiatives individuelles de l'Autriche ou de la Prusse)[135]. Cela mena à plusieurs crises, comme la guerre contre le Danemark au sujet de la question du Schleswig-Holstein. (Voir plus haut Holstein et Schleswig ; première guerre dano-allemande).
Vote de la constitution, puis refus de la couronne impériale |
Malgré tout, le parlement se prononça le 28 décembre 1848 pour un ensemble de droits fondamentaux[143], puis, le 28 mars 1849, vota la Constitution de Francfort avec une majorité de 42 voix. Pour ce vote, les libéraux du centre-droit s'allièrent à ceux du centre-gauche, on parle de « pacte Simon-Gagern[citation 36],[134] ». Elle prévoyait une monarchie constitutionnelle héréditaire, une unification avec la solution petite-allemande dont le roi de Prusse serait l'empereur, le suffrage universel direct et secret, ainsi qu'un veto suspensif[33].
Le 3 avril, lorsque le roi Frédéric-Guillaume IV de Prusse refusa la dignité d'empereur que lui proposait la députation impériale[citation 37], le Parlement de Francfort fut de fait un échec[129],[144]. 29 des États de moyenne puissance approuvèrent la Constitution. L'Autriche, la Bavière, la Prusse, la Saxe et Hanovre la refusèrent. Les députés prussiens et autrichiens quittèrent le Parlement lorsqu'ils furent révoqués par leur gouvernement[59].
Fin du parlement et de la révolution |
Afin de faire toutefois aboutir la Constitution dans les Länder isolés malgré le renforcement de la contre-révolution, il y eut en mai 1849 dans certains centres révolutionnaires des « soulèvements de mai » dans le cadre de la campagne pour la constitution du Reich[citation 38]. Ces soulèvements créèrent un deuxième sursaut révolutionnaire radicalisé qui prit des proportions semblables à une guerre civile dans certaines régions de la Confédération, par exemple le Pays de Bade et la Saxe[145]. Le Parlement de Francfort perdit la plus grande partie de ses membres en raison des révocations et d'autres défections, et se retira à Stuttgart le 30 mai 1849 sans les députés prussiens et autrichiens sous la forme d'un parlement croupion[citation 32]. Il restait 130 députés[146]. Le 18 juin 1849, ce parlement fut violemment dissous par les troupes du Wurtemberg. C'est avec la défaite des derniers combats révolutionnaires du 23 juillet à Rastatt que la révolution de Mars fut définitivement mise en échec[59],[49].
Répercussions et conséquences en Allemagne |
Conséquences immédiates |
Après l'échec de la révolution, une contre-révolution réactionnaire triompha. Dans la décennie qui suivit 1848, appelée « ère réactionnaire », s'établit de nouveau une période de Restauration, qui ne prit cependant pas tout à fait les proportions de la répression de Metternich pendant le Vormärz[147],[148].
En dehors de la Confédération germanique, la révolution fut aussi écrasée. En France, la République se maintint jusqu'en 1851-1852[149]. Les constitutions ne se maintinrent durablement qu'au Danemark, en Prusse et au Royaume de Sardaigne[150]. La constitution du Royaume de Sardaigne fut la base du Royaume d'Italie unifié en 1861 (voir Risorgimento).
Après son échec provisoire lors de la conférence d'Olmütz de 1850[151], l'idée d'une union de la petite Allemagne fut imposée et réalisée « d'en haut » par les puissances conservatrices dominantes menées par la Prusse sous la direction d'Otto von Bismarck en tant que ministre-président prussien à partir de 1862, après les trois guerres d'unification allemande menées par la Prusse contre le Danemark, contre l'Autriche et contre la France. En 1871, à la suite de la victoire de la Prusse sur la France, le roi Guillaume de Prusse fut couronné premier empereur allemand à Versailles sous le nom de Guillaume Ier d'Allemagne et l'Empire allemand fut proclamé ; jusqu'en 1890, le chancelier impérial Bismarck joua un rôle prépondérant dans sa politique[152]. L'influence de la révolution dans le processus d'unification est indéniable[148].
Acquis de la révolution |
L'échec évident des objectifs nationalistes de la révolution de Mars[153] détourna souvent l'attention des succès certains et des progrès durables qui furent atteints dans les années de la Révolution et sur lesquels la contre-révolution victorieuse ne put revenir, comme en premier lieu la fin définitive de l'ordre féodal[147]. Une grande partie de la population rurale et paysanne adhéra aux revendications d'abolition du servage héréditaire et des redevances féodales, ce qui la conduisit à participer aux mouvements de Mars 1848, en particulier en Autriche[154].
Un autre succès certain des années révolutionnaires fut l'abolition de la justice inquisitrice secrète des périodes de la Restauration et du Vormärz. L'exigence du caractère public de la juridiction répressive et de la cour d'assises faisait partie des revendications fondamentales de Mars. Sa mise en place conduisit à une amélioration durable de l'équité juridique. La constitution prussienne fut également un acquis certain[148].
De plus, pendant la Révolution, à la suite de l'assouplissement de la censure, une presse plus ou moins pluraliste émergea. Le nombre de journaux politiques passa ainsi de 118 en 1847 à 184 en 1850. En Autriche, il n'y avait que 79 journaux avant la révolution, contre 388 ensuite. Dans toute l'Allemagne, le nombre de journaux aurait atteint 1 700 en 1848[155]. Ceux de gauche comme de droite gagnèrent en influence sur les actualités politiques. À gauche, on peut citer par exemple le journal publié par Karl Marx, la Neue Rheinische Zeitung (Nouvelle Gazette rhénane), qui fut interdit le 19 mai 1849[156]. Le centre modéré était entre autres représenté par la Deutsche Zeitung (Journal allemand) et la droite par la Neue Preußische Zeitung (Nouvelle Gazette prussienne) à la création de laquelle Otto von Bismarck fut associé[157]. C'est avec le Kladderadatsch (Patatras) que vit le jour le 7 mai 1848 l'un des premiers grands magazines satiriques d'Allemagne[158],[159].
Influences sur les différentes mouvances politiques et associatives |
Le rétablissement de la liberté associative en Allemagne eut pour conséquence la formation de nombreuses associations, politiques notamment. Elles peuvent être classées en associations ouvrières, démocratiques, constitutionnelles, catholiques, rurales, et groupes d'intérêt citoyens[160], les associations conservatrices étant peu développées[161]. Les premières, rassemblées dans la fraternité générale des travailleurs allemands fondée le 3 septembre 1848 à Berlin[162],[163], étaient au nombre de 170, pour un total de 15 000 membres au début de 1849[164]. C'était la première organisation de travailleurs présente dans plusieurs régions en Allemagne : elle eut notamment un rôle important dans l'émergence des syndicats[165]. Les associations démocratiques, également nommées « populaires[citation 39] », étaient à leur apogée, au nombre d'environ 200 pour 200 000 membres[166]. Début 1849, elles se rassemblèrent pour former le « Centralmärzverein » qui, en mars, comptait 950 associations et 500 000 adhérents[167]. Les associations constitutionnelles, appelées aussi « patriotiques[citation 40] », rassemblaient les libéraux[168]. Elles étaient moins importantes en nombre d'adhérents que les associations populaires[169], leur association nationale rassembla ainsi, en avril 1849, 160 associations locales[168]. Les associations catholiques, dites aussi « Pi », étaient aussi très répandues : dans le seul Bade, il y avait 400 associations pour 100 000 membres[170]. Les associations rurales[citation 41], présentes seulement en Silésie, se regroupèrent en août 1848 dans le « Hauptristikalverein ». Elles étaient au nombre de 200, pour 200 000 membres[171]. Enfin, le mouvement ouvrier était naissant[172].
Les nouveaux mouvements réclamant une émancipation, en particulier le mouvement ouvrier et le mouvement féministe, n'avaient pas eu un poids important dans la révolution. Ils n'étaient pas directement représentés au parlement, tout au plus la gauche libéral-démocrate bourgeoise défendait leurs intérêts. La révolution a cependant fortement influencé leur développement[173].
En ce qui concerne les féministes, le 12 mai 1849 la journaliste et avocate du droit des femmes Louise Otto-Peters fonda le journal politique Frauen-Zeitung (Journal des femmes), où elle appelait au regroupement des ouvrières au sein d'associations afin de défendre leurs intérêts[174],[175].
Une période de réaction suivit directement la révolution, marquée par les procès contre les démocrates et les communistes, et par la censure et le contrôle de l'administration[176]. Elle laissa cependant rapidement la place à une ère plus libérale dite « Neue Ära » entre 1849 et 1866. Elle vit notamment les forces libérales se renforcer et se rassembler en 1861 dans le premier parti politique allemand : le parti progressiste allemand[177]. Toutefois, Wolfgang Siemann nota que toutes ces associations politiques préfiguraient les partis politiques modernes. Il faut par ailleurs définir avec précision le terme de « parti » pour déterminer quel est le premier parti allemand[178].
La plupart des démocrates radicaux, quand ils n'avaient pas été emprisonnés ou exécutés, s'étaient exilés[179]. Les années 1848-1849 virent une vague d'émigration massive. Pendant les années 1847, 1848 et 1849, respectivement 78 800, 59 000 et 61 700 Allemands émigrèrent, surtout vers les États-Unis[180]. Les émigrants y étaient désignés par le nom de « Forty-Eighters » ce qu'on pourrait traduire par « quarante-huitards ». Beaucoup de ces émigrés s'impliquèrent dans la vie démocratique locale[49]. Ainsi ils furent nombreux à soutenir Abraham Lincoln lors des élections présidentielles américaines, à combattre l'esclavage ou à prendre part à la guerre de Sécession au côté des États du Nord de 1861 à 1865. Certains firent également une carrière politique comme Lorenz Brentano[181] ou Carl Schurz (ministre de l'intérieur de 1877 à 1881)[182].
Les autres démocrates radicaux, qui étaient restés en Allemagne ou qui y étaient revenus après l'amnistie de 1862, rejoignirent massivement le mouvement ouvrier et la social-démocratie[183].
Historiographie |
Postérité de la révolution |
D'abord mis au ban, par le royaume de Prusse notamment[184], l'Empire allemand se considérait comme l'aboutissement de la révolution de Mars, mais en sous-estimait l'influence et ne suivait pas son esprit. Ainsi le parlement national et une partie de la constitution étaient repris des acquis de la révolution de Mars[185]. Toutefois les droits fondamentaux n'étaient pas inscrits dans la constitution mais seulement assurés au moyen de lois[186].
La République de Weimar était fidèle à la révolution de Mars et remit en avant ces événements. Sa Loi fondamentale était fondée sur le projet de constitution élaboré dans l'église Saint-Paul de Francfort[187],[188].
Adolf Hitler détourna la révolution à des fins expansionnistes, y trouvant une justification pour l’Anschluss. Finalement, après la Seconde Guerre mondiale, les deux États allemands se disputèrent l'héritage révolutionnaire : la RFA se prévalait de la liberté d'expression, de presse et de circulation réclamée en 1848 ; la RDA, de sa tradition révolutionnaire[188]. Au XXe siècle, un grand nombre de mouvements politiques allemands, surtout en Allemagne de l'Est, de la gauche radicale aux nationalistes en passant par les démocrates, se réclamaient de la révolution de 1848[189].
Causes de l'échec |
Les causes de l'échec de la révolution ont longtemps été analysées[139]. Pêle-mêle, on peut citer le dualisme Autriche/Prusse qui empêche toute évolution ; la division entre les libéraux et les démocrates ; le rejet de la révolution par les bourgeois et les libéraux de peur de la voir se transformer en révolution d'Octobre ou en nouvelle Terreur française[139] ; le manque de soutien des autres grandes puissances européennes ; le choix personnel de Frédéric-Guillaume IV de Prusse qui a été trop vu comme l'homme providentiel ; la rapide victoire en Mars qui donne aux députés des attentes irréalistes comme la création simultanée d'un État-nation, la proclamation des droits fondamentaux et d'acquis sociaux. Botzenhart dit résumer la pensée de Langewiesche, Wehler et Siemann en disant qu'il y avait trop de problèmes à régler. Il ajouta que les difficultés de la Révolution française, alors que là-bas la situation était plus simple, montre combien la tâche était difficile[148]. Nipperdey quant à lui exposa les « pour » et les « contre » de la politique des libéraux, puis conclut que la faute n'est à imputer ni aux démocrates ni aux libéraux, car leur mésentente était inévitable. Il conclut que les éléments contraires étaient trop nombreux[139].
La répression de la Révolution et la victoire des réactionnaires engendrèrent un dualisme spécifiquement allemand entre les idées de « Nation » et de « Démocratie » qui marqua pour longtemps l'histoire allemande et qui est encore sensible au XXIe siècle. À la différence de la France, des États-Unis ou d'autres pays où, à la suite de révolutions victorieuses, « Nation » et « Démocratie » sont plutôt vues traditionnellement comme une unité et où l'adhésion à la Nation inclut en général également l'adhésion à la Démocratie, en Allemagne la relation entre Nation et Démocratie est encore de nos jours (2015) un objet de débats polarisants, controversés et souvent très empreints d'une dimension émotionnelle (voir Sonderweg)[35].
Notes et références |
(de) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en allemand intitulé « Deutsche Revolution 1848/1849 » (voir la liste des auteurs).
Références |
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partiellement sourcé dans Langewiesche 1983, p. 153
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Voir aussi |
Bibliographie |
: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.
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En anglais |
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En français |
- Heinrich August Winkler (trad. Odile Demange), Histoire de l'Allemagne XIXe-XXe siècle - Le long chemin vers l'Occident, Fayard, 2005(ISBN 2213624437)
Articles connexes |
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