Sidérurgie
Le terme sidérurgie — du grec ancien σιδηρουργεῖον, sidérourguéïon (« atelier du forgeron »), lui-même formé à partir de σίδηρος sideros (« fer ») et de ἔργον ergon (« travail ») — désigne à la fois les technologies d'obtention de la fonte, du fer et de l'acier à partir de minerai de fer, mais aussi l'industrie qui les met en œuvre.
Sommaire
1 Définition
1.1 Origine du terme
1.2 Acception moderne du mot
2 Les produits
2.1 Produits plats
2.2 Produits longs
3 Particularités
3.1 Poids économique
3.2 Importance stratégique
3.3 Économie
4 Bibliographie
5 Voir aussi
5.1 Articles connexes
5.2 Liens externes
6 Notes et références
6.1 Notes
6.2 Références
Définition |
Origine du terme |
La création du terme « sidérurgie » est liée à la nécessité de distinguer la métallurgie du fer dans le vaste domaine de la métallurgie en général[1].
Sa première attestation date de 1761, dans trois mémoires adressés à l'Académie des Sciences par Pierre-Clément Grignon, maître de forges. Il est sans doute le créateur du terme, ainsi que de « sydérotechnie » qui apparaît dans les mêmes mémoires. En 1775, Grignon précise qu'il entend par « sidérurgie » « l'art de fabriquer le fer », et par « sydérotechnie » « l'art de travailler le fer »[2].
« Sydérotechnie » semble s'imposer d'abord comme cela apparaît dans le monumental ouvrage d'Hassenfratz, en 1812, La Sidérotechnie. Mais cet ouvrage comporte lui-même la marque du succès futur de « sidérurgie » dans l'emploi du nom dérivé « sidérurgiste » qui y apparaît pour la première fois[3].
Acception moderne du mot |
Si le terme « sidérurgie » évoque donc, étymologiquement, l'ensemble de l'industrie des métaux ferreux, on retient maintenant un périmètre beaucoup plus restrictif :
« [Les usines sidérurgiques] ne recouvrent que les produits bruts (acier liquide et lingots), les demi-produits désignés selon leur forme et leur section, les produits finis exclusivement obtenus par laminage. S'ils subissent d'autres modes de transformation, ils appartiennent sans équivoque à l'industrie métallurgique. À savoir, par forgeage […], par moulage […] et autres premières transformations des métaux (étirage, tréfilage,…)[4] »
— Daniel Rivet, L'acier et l'industrie sidérurgique
Les produits |
On distingue généralement la sidérurgie associée au produits plats de celle liée aux produits longs. La notion de plat/long se situe au carrefour du produit et de la marchandise. Au niveau du processus productif, le train continu à chaud à large bande, dont sont issus les produits plats, a dimensionné les outils sidérurgiques dans le milieu du XXe siècle. Au niveau des marchés, le plat est lui-aussi la catégorie économiquement dominante. La notion a en outre une valeur explicative importante et permet de saisir un grand nombre de phénomènes économiques propres à la sidérurgie[5].
Produits plats |
Les produits plats sont obtenus par laminage ; ils comprennent :
- les tôles fortes (de 10 à 420 mm d'épaisseur), qui servent à la réalisation de gros tubes soudés, la construction navale, le bâtiment, les ouvrages d'art et la chaudronnerie ;
- les tôles minces (entre environ 0,3 et 10 millimètres d'épaisseur), utilisées notamment pour la construction automobile, l'emballage, l'électroménager, la couverture et le bardage de bâtiments (tôles profilées ou ondulées).
Évolution du rapport entre consommation de produits plats / total[5] | |||||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
1905 | 1915 | 1925 | 1937 | 1945 | 1955 | 1960 | 1964 | 1972[6] | |
États-Unis | 20,5 | 34,4 | 40,0 | 45 | 54,0 | 67,5 | 70,1 | 65,7 | |
CECA[7] | 41,5 | 46,3 | 48,9 | 55,6 | |||||
Japon[8] | 62,1 | ||||||||
URSS[8] | 44,9 |
Produits longs |
Les produits longs regroupent les barres (ronds, carrés), les profilés (comme les rails de chemin de fer, les poutrelles en forme de H, U, I ou L), ainsi que les produits tréfilés.
Ils sont utilisés dans toutes les industries, ainsi que dans le bâtiment (par exemple : aciers pour armatures de béton armé).
Particularités |
Poids économique |
Au Luxembourg, l'industrie sidérurgique a été pendant longtemps la première source d'emploi et de richesse du pays, jusqu'à représenter 45 % du PIB national en 1977[9]. Le dernier haut fourneau à Esch-Belval ferme pourtant en 1997.
La sidérurgie est devenue l'exemple même de l'industrie lourde. Au début du XXe siècle, l'investissement lié à la construction d'une usine « standard » de brames, à partir de minerai de fer et de houille, d'une capacité de 5 millions de tonnes par an, peut atteindre 9 milliards de dollars[10]. Malgré leur taille, les entreprises sont fragilisées par les investissements qu'elles consentent. Les sidérurgistes lorrains ont, par exemple, été pénalisés par la construction de l'usine à chaud de la Solmer à Fos-sur-Mer, qui a coûté 14 milliards de francs en 1974[11], mais inaugurée en plein choc pétrolier, ce qui a bloqué la finalisation de l'usine et pénalisé sa rentabilité, au point que le gouvernement estima 10 ans après que la meilleure solution consisterait à tout fermer[12]. De même, et plus récemment, victime de la crise de 2008, le complexe sidérurgique américain de ThyssenKrupp (aciérie au Brésil et laminoirs en Alabama), dont la construction avait coûté, en 2010, près de 15 milliards de dollars[note 1] au sidérurgiste allemand, a été revendu à ses concurrents 4,2 milliards trois ans après[14].
Importance stratégique |
« L'acier a d'abord été un facteur de souveraineté : si l'argent est le nerf de la guerre, l'acier en est le muscle, au moins depuis 1850[15] ». Pourtant, c'est au cours de la guerre froide que la sidérurgie perd son importance stratégique : l'aviation et les armes nucléaires ne lui doivent rien.
Économie |
Le montant d'une usine neuve étant très conséquent (le « ticket d'entrée » d'une grosse usine à chaud de 9 milliards de dollars équivaut au PIB annuel de Malte), la sidérurgie est donc souvent marquée par :
- une participation ou une protection de la part des États, tant pour constituer que pour pérenniser un outil industriel.
- la modernisation permanente des outils existants, moins coûteuse que la construction d'installations neuves.
- des fluctuations importantes des prix de vente (comme pour l'essence ou l'acier), dues au fait que l'offre ne peut qu'évoluer plus lentement que la demande.
L'apparition de l'aciérie électrique a brutalement stoppé la course à la taille des complexes sidérurgiques. Le recyclage compte pour un tiers de la production mondiale d'acier. Cette proportion est encore plus élevée dans les pays développés qui disposent de beaucoup de ferrailles. En effet, en 2007, la Chine produit un tiers de l'acier mondial mais attire 50 % des exportations du minerai de fer[16]. Les bénéfices de l'ensemble des entreprises chinoises de sidérurgie ont atteint 17 milliards d'euros en 2007[16].
Bibliographie |
- Le fer au XVIIIe siècle, l'exploitation du fer jusqu'à la Révolution
Jacques Levainville, L'Industrie du fer en France, Paris, Armand Colin, 1922 ; 1932, médaille d'or de la Société de géographie
Voir aussi |
Articles connexes |
- Articles génériques
- Histoire de la production de l'acier
- Fabrication de l'acier
- Production d'acier
- Métallurgie
- Outils
- Usine d'agglomération
- Cokerie
- Haut fourneau
- Aciérie
- Convertisseur
- Aciérie électrique
- Laminoir
- Produits
- Fonte
- Coke
- Acier
- Laitier
- Sujets connexes
- Crise de la sidérurgie dans le bassin lorrain
Liens externes |
(fr) Comment fabrique-t-on l'acier ? sur le site du groupe Arcelor
www.arcelormediterranee.com - L'acier dans toute sa dimension (ArcelorMittal Fos-sur-Mer et St-Chély d'Apcher)
Notes et références |
Notes |
Soit presque le double de l'estimation initiale, qui était de 5,2 milliards de dollars[13]!
Références |
Roland Eluerd, Les Mots du fer et des Lumières, Champion, p. 126-128
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5510881p/f716.image.r=.langFR
R. Eluerd, ouv. cité, III, p. 59
Daniel Rivet, L'acier et l'industrie sidérurgique, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Que sais-je? » (no 561), 1978, 128 p. (ISBN 2 13 035632 X), p. 46
[PDF]Jean-Yves Debost et Bernard Réal, Les rapports des industries de la manutention avec l'évolution des processus de production et des moyens de transport dans le cours de l'internationalisation du capital, Université des Sciences Sociales de Grenoble, Institut de Recherche Economique et de Planification, mars 1975(lire en ligne), partie 2, p. 47-64
Marc Installé, « L'industrie sidérurgique en Belgique (I) », Courrier hebdomadaire du CRISP, CRISP, nos 660-661, 1974 /34-35 (ISSN 0008-9664, lire en ligne)
« La structure de la sidérurgie belge (II) », Courrier hebdomadaire du CRISP, CRISP, nos 305-306, 1965 /37 (ISSN 0008-9664, lire en ligne)
Jacques Malézieux, Les Centres sidérurgiques des rivages de la mer du Nord et leur influence sur l'organisation de l'espace, Publications de La Sorbonne, 1981, p. 57
[PDF]Michel Freyssenet, La sidérurgie française 1945-1979 : L'histoire d'une faillite. Les solutions qui s'affrontent, Paris, Savelli, coll. « Documents critiques », 1979, 241 p. (ISBN 9782859300302, OCLC 417353871, notice BnF no FRBNF34648522, présentation en ligne, lire en ligne), p. 154
(en) « Brazil may bar Thyssen unit sale to foreigner », Reuters, 15 juin 2012(lire en ligne)
[PDF]Michel Freyssenet, La sidérurgie française 1945-1979 : L'histoire d'une faillite. Les solutions qui s'affrontent., Paris, Savelli, coll. « Documents critiques », 1979, 241 p. (ISBN 9782859300302, OCLC 417353871, notice BnF no FRBNF34648522, présentation en ligne, lire en ligne)
[PDF]Olivier C. A. Bisanti, « L'aventure sidérurgique de Fos-sur-Mer - Logiques d'hier, d'aujourd'hui et de demain », soleildacier.ouvaton.org, 7 avril 2003
(en) « Second blast furnace fired up at ThyssenKrupp CSA in Brazil », ThyssenKrupp, 20 décembre 2010
(en) « ArcelorMittal, Nippon Steel Buy ThyssenKrupp Alabama Steel Mill for $1.55 Billion », Reuters, 29 novembre 2013(lire en ligne)
[PDF]Olivier C. A. Bisanti, « L’aventure sidérurgique de Fos-sur-Mer », Soleil d'acier, 15 avril 2002
Alain Faujas, « Le minerai de fer augmentera d'au moins 65 % en 2008 », dans Le Monde du 20-02-2008, mis en ligne le 19-02-2008, [lire en ligne]
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