Effet multiplicateur




Un effet multiplicateur résulte de la constatation de ce que, dans un système donné, une variation initiale d’un élément situé à l’entrée (« input » ou intrant) provoque par l’intermédiaire d’entraînements successifs, une variation finale plus importante d’un ou plusieurs autres éléments situés en sortie (« outputs » ou extrants).


Ainsi en sciences économiques, la variation du montant d’une dépense peut avoir un effet multiplicateur sur le revenu national ou l’activité économique générale. La logique et la portée de cet effet multiplicateur simple dans son principe élémentaire — restent cependant un sujet de débat entre les diverses écoles de pensée économique quant à ses répercussions réelles (conséquences sur les volumes, sur la chronologie ou la plus ou moins grande étendue de ses effets...).




Sommaire






  • 1 Principe du multiplicateur


  • 2 Démonstration


  • 3 Multiplicateur keynésien


    • 3.1 Plaidoyer pour un État proactif face à la conjoncture


    • 3.2 Vers la recherche de la croissance équilibrée de plein emploi


    • 3.3 Critiques et limites du multiplicateur keynésien




  • 4 Méthodes


  • 5 Formule théorique


    • 5.1 Cas d’une économie fermée


    • 5.2 Cas d’une économie ouverte


    • 5.3 L’effet multiplicateur induit par la baisse des impôts[2]




  • 6 Notes et références


  • 7 Voir aussi


    • 7.1 Articles connexes


    • 7.2 Liens externes







Principe du multiplicateur |


Pour prendre le cas d’une dépense publique : 100 euros dépensés par l’État donnent lieu à une commande du même montant, qui va accroître le revenu du bénéficiaire. Revenu qui sera à son tour utilisé en dépense ou en épargne. Si le taux d’épargne des bénéficiaires est de 20 %, ces 100 euros vont générer une nouvelle dépense de (100 - 20) = 80 euros. Cette somme est aussi utilisée par son bénéficiaire, qui peut aussi — après avoir épargné 20 % — dépenser (80 - 16) = 64 euros. Il y a à ce stade, 20 euros d’épargne pour le premier bénéficiaire, 16 euros d’épargne et 64 euros dépensés pour le second, soit une somme totale de 100 euros. Et ainsi de suite jusqu’à épuisement de l’effet : les sommes redistribuées à chaque stade s’amenuisent pour tendre vers zéro.


À la quatrième itération, la somme est ainsi répartie : 20 euros de placements pour le premier bénéficiaire, 16 pour le second, 12,8 pour le troisième et 10,24 pour le quatrième, plus une dépense du quatrième de 40,96 euros. La somme totale est toujours 100.


Le total des sommes reçues est de 100 (1er bénéficiaire) + 80 (2e) + 64 (3e) + 51,2 (4e) + 40,96 (correspondant à la dépense du 4e bénéficiaire, mais non utilisée pour le moment), soit une somme de 336,16 euros.


Le total des sommes dépensées est de 80 (1er) + 64 (2e) + 51,2 (3e) + 40,96 (4e), soit 236,16 euros.
La différence provient des 100 euros initialement versés par l’État.


Au bout du compte, on constate que 100 euros de dépense publique provoquent un accroissement du revenu national plus important (d’où l’idée de multiplication) que la dépense initiale. Le montant de cet accroissement, sur une période infinie, est donné par la formule : 100⋅(11−0,8)=500 euros{displaystyle 100cdot left({frac {1}{1-0,8}}right)=500 euros}{displaystyle 100cdot left({frac {1}{1-0,8}}right)=500 euros}

Le multiplicateur n’est autre qu’un effet de second tour sur le circuit économique engendré par la dépense. Avec un taux d’épargne tendant vers 0%, le dénominateur tend vers 0 et le revenu national tend vers l’infini.


Parallèlement, la dépense nationale augmente selon la formule : 100⋅(11−0,8−1)=400 euros{displaystyle 100cdot left({frac {1}{1-0,8}}-1right)=400 euros}{displaystyle 100cdot left({frac {1}{1-0,8}}-1right)=400 euros}


En généralisant le propos, on peut dire que, dans une économie, la variation de l’une des composantes de la demande (initiée par une variation de la dépense publique, de l’investissement, de l’octroi du crédit, des salaires, etc.) provoque une variation plus élevée du revenu national.



Démonstration |


Avant toute chose il est primordial de poser les hypothèses suivantes :


- Nous nous situons dans une économie fermée.
- Nous nous situons au Royaume-Uni à l'époque de Keynes dans les années 30 dans une économie de sous-emploi.
- Absence de goulots d'étranglements.




Une quelconque variation de l'investissement entraîne :


⇔ Δ1 Y = Δ I


⇔ Δ1 R = Δ1 Y = Δ I


⇔ Δ1 C = aΔ1 R = aΔ I


⇔ Δ2 Y = Δ1 C = aΔ I


⇔ Δ2 R = aΔ I


⇔ Δ2 C = aΔ2 R = a²Δ I


Et ainsi de suite...


Nous conjecturons alors que :


Σ{displaystyle Sigma }Sigma ΔY = ΔI + aΔI + a²ΔI + ... + an{displaystyle a^{n}}a^{n}ΔI pour i allant de 1 à n


Σ{displaystyle Sigma }Sigma ΔY = ΔI(1 + a + a² + ... + an{displaystyle a^{n}}a^{n})


Nous avons ici la somme d'une suite géométrique de raison "a" et de premier terme "1" :


Σ{displaystyle Sigma }Sigma ΔY = ΔI(1−an)÷(1−a){displaystyle (1-a^{n})div (1-a)}{displaystyle (1-a^{n})div (1-a)}


Or, liman=0{displaystyle lim a^{n}=0}{displaystyle lim a^{n}=0} Quand n tend vers plus l'infini.


Donc : Σ{displaystyle Sigma }Sigma ΔY = ΔI (1/(1−a){displaystyle 1/(1-a)}{displaystyle 1/(1-a)})


Avec, I = investissement


Y = le niveau de production


R = les revenus distribués


C = la consommation des ménages


a = la propension marginale à consommer (environ 80% en France)


Par exemple une hausse de l'investissement de 1 milliard d'euros entraîne une hausse de la production de 5 milliards d'euros. Cette formule du multiplicateur dépend de la propension marginale à consommer des ménages et plus celle-ci est faible moins le multiplicateur sera efficace. C'est pour cela, entre autres, que Keynes parlait de "l'euthanasie des rentiers", en effet les rentiers tirent leurs revenus de leur épargne et donc augmentent la propension marginale à épargner ce qui diminue l'effet du multiplicateur.



Multiplicateur keynésien |



Plaidoyer pour un État proactif face à la conjoncture |


Keynes reformule l’idée de l’effet multiplicateur de la dépense (décrit en premier par Kahn en 1931) et prend le contrepied de l’orthodoxie budgétaire classique :



  • Le sens commun — qui affirme que les dépenses de l’État doivent se calquer sur les fluctuations de ses recettes — conduit en réalité en cas de mauvaise conjoncture à pousser davantage l’économie vers la dépression .

  • L’État a la responsabilité de la politique budgétaire, ce qui signifie selon Paul Samuelson [1] :


« Par politique budgétaire active, nous entendons le processus consistant à utiliser les impôts et les dépenses publiques aux fins de :



- contribuer à amortir les oscillations économiques

- favoriser le maintien d’une économie progressive, assurant un degré d’emploi élevé, affranchie de toutes poussées excessives d’inflation ou de déflation ».


Keynes révolutionne les finances publiques en affirmant que l’État doit — si les circonstances l’exigent — faire exactement l’inverse de ce que font les agents économiques :



  • Lorsque le revenu national baisse, que les dépenses privées diminuent, l’État soutient l’économie en injectant des dépenses supplémentaires. Cette injection soutient la demande effective qui influe à son tour le niveau de production, et par voie de conséquence l’emploi.

  • Lorsque l’économie est en surchauffe et que le revenu s’emballe et que les prix montent de manière excessive ou que l’investissement dépasse les possibilités d’épargne, l’État — a contrario — réduit la pression en limitant ses dépenses.



Vers la recherche de la croissance équilibrée de plein emploi |


L’objectif à viser n’est donc plus forcément l’équilibre du budget, mais d’une manière plus globale l’établissement d’une croissance équilibrée génératrice de plein emploi. Pour Keynes, l’équilibre économique peut être obtenu avec un budget déséquilibré (recettes inférieures aux ressources)
grâce à l’effet stimulant que provoque l’effet multiplicateur sur les agents économiques déprimés.



Critiques et limites du multiplicateur keynésien |


Plusieurs aspects sont souvent omis :




  • exportation de la relance : une partie de la hausse de la demande se porte sur des biens importés, ce qui a un impact négatif sur la balance commerciale et surtout réduit l’effet multiplicateur. Cet effet modérateur est d’autant plus important que l’économie est ouverte, ce qui est de plus en plus fortement le cas, avec l’augmentation du taux d’ouverture des économies ;


  • effet d’éviction : la demande ajoutée peut venir en substitution, plutôt qu’en complément, de la demande normale ; on essaye de l’éviter en concentrant l’effort sur des biens spécifiques (routes, grandes infrastructures...), mais même ainsi, les ressources mobilisées par la demande nouvelle (notamment en capital et main-d’œuvre rare) sont autant de retranchées à l’offre actuelle, ce qui la renchérit et peut faire baisser la demande ultérieure ;


  • importance de la confiance accordée : si les agents économiques ne croient pas à la politique menée, ils vont anticiper son échec et agir en conséquence. C’est-à-dire épargner, réduire leur demande, exporter leur capital, etc. avec des conséquences économiques négatives importantes, qui seront elles aussi multipliées (le multiplicateur s’applique aussi à la demande privée, mais dans ce cas, en moins).


Ainsi l’effet pourrait être positif à court terme, mais ensuite s’estomper rapidement voire devenir négatif sur le moyen terme.
Des écoles de la pensée économique (école de l’offre, école monétariste, école autrichienne…) estiment que même l’effet à court terme est négatif. Une intervention supplémentaire de la sphère publique dans l’économie perturbe les acteurs et décourage la prise de risque et l’investissement privé.



Méthodes |


L’augmentation des dépenses de l’État se fait soit par une augmentation des investissements (construction d’infrastructures, etc.) soit par des versements monétaires à certains agents économiques (fonctionnaires, bénéficiaires de minima sociaux…)


En cas de transfert monétaire à des agents économiques, l’effet multiplicateur ne fonctionnera que si ces agents dépensent cet argent plutôt que de l’épargner. Or, selon le principe de l’équivalence ricardienne, les agents économiques pourraient avoir tendance à épargner en prévision d’une hausse future de l’imposition. Cette propension à épargner est d’autant plus forte que les revenus antérieurs (aux versements de l’État) couvraient les besoins fondamentaux des bénéficiaires.



Formule théorique |



Cas d’une économie fermée |


Pour une économie fermée, soit ΔY la croissance économique, ΔI la variation de l’investissement, ΔT la variation de l’imposition, k1 le multiplicateur d’investissement et k2 le multiplicateur de l’imposition. On a :


ΔY=k1⋅ΔI−k2⋅ΔT{displaystyle Delta Y=k1cdot Delta I,-k2cdot Delta T,}{displaystyle Delta Y=k1cdot Delta I,-k2cdot Delta T,}


Cas d’une économie ouverte |


Dans une économie ouverte, il faut tenir compte de l’augmentation des importations provoquée par l’augmentation de la demande ; avec ΔM la variation des imports :


ΔY=k1⋅ΔI−k2⋅ΔT−ΔM{displaystyle Delta Y=k1cdot Delta I,-k2cdot Delta T,-Delta M,}{displaystyle Delta Y=k1cdot Delta I,-k2cdot Delta T,-Delta M,}


L’effet multiplicateur induit par la baisse des impôts[2] |


La théorie keynésienne pose que la consommation est fonction du revenu disponible. Donc, C(Y-T) où Y est le revenu total et T représente les impôts. Chaque variation du revenu disponible va se traduire par une variation de la consommation de :


 Propension marginale à consommer×∆Revenu disponible

Donc, dans le cas d’une variation du revenu disponible induite par la diminution des impôts de ∆T, la consommation va s’accroître de :


 Propension marginale à consommer×∆T

Cette variation de la consommation va avoir une répercussion plus que proportionnelle sur la production de par l’effet multiplicateur dont voici la formule :


 ∆T×PmC[3] / (1-PmC)


Notes et références |




  1. L'Économique Tome 1


  2. Grégory N.Mankiw. Macroéconomie p.377, 5e édition française.


  3. Signifie Propension marginale à consommer



Voir aussi |



Articles connexes |


  • Effet multiplicateur du crédit

1/(1−c){displaystyle 1/(1-c)}{displaystyle 1/(1-c)} propension marginale à consommer



  • politique conjoncturelle

  • politique contracyclique

  • stabilisateur automatique (économie)

  • budget cyclique

  • Modèle multiplicateur-accélérateur



Liens externes |



  • politique budgétaire, site des administrations publiques françaises "vie publique"


  • Portail de l’économie Portail de l’économie



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