Genre (sciences sociales)
Pour les articles homonymes, voir genre.
Le genre est un concept utilisé en sciences sociales pour désigner les différences non biologiques entre les femmes et les hommes.
Alors que le type sexuel fait référence aux différences biologiques entre femmes et hommes, le genre réfère aux différences sociales entre femmes et hommes. Ces différences produisent des conséquences psychologiques, mentales, économiques, démographiques, ou encore, politiques.
Le genre est l'objet d'un champ d'études en sciences sociales, les études de genre. Ce concept est apparu dans les années 1950 dans les milieux psychiatriques et médicaux, aux États-Unis. À partir des années 1970, le genre est fréquemment utilisé par les féministes pour démontrer que les inégalités entre femmes et hommes sont issues de facteurs sociaux, culturels et économiques plutôt que biologiques[1].
Les théoriciens du concept de genre rejettent l'expression « théorie du genre » ; celle-ci est essentiellement utilisée en France par ceux qui contestent la scientificité et les méthodes des études de genre, afin de critiquer et de disqualifier le concept de genre.
Pour un certain nombre de critiques, les études de genre sont avant tout une idéologie non scientifique dont l'objectif est de « déconstruire » les fondements de la société traditionnelle au nom du principe d'égalité.
Sommaire
1 Histoire et définition
1.1 Étymologie
1.2 Histoire en sciences sociales
1.3 Usage courant
1.4 Définition
2 Construction sociale
2.1 Première vague : le sexe social
2.2 Deuxième vague : critique et révision du sexe social
2.2.1 Assignation
2.2.2 Critères biologique d'assignation à un sexe à la naissance
3 Processus relationnel
4 Rapport de pouvoir
5 Genre et autres rapports de pouvoir
6 Politique publique et genre
7 Inégalités entre hommes et femmes
8 Critiques du concept de genre et « théorie du genre »
8.1 L'expression « théorie du genre » : querelle sémantique
8.2 Idéologie de déconstruction
8.3 Polémique en France
8.4 Négation de la biologie
8.5 Aspect non scientifique
9 Notes et références
9.1 Notes
9.2 Références
10 Annexes
10.1 Bibliographie
10.1.1 Ouvrages généraux
10.1.2 Ouvrages critiques
10.2 Articles connexes
10.3 Liens externes
Histoire et définition |
Étymologie |
Le mot « genre » vient du latin : genus, devenu en ancien français « gendre ». Le mot a d'abord le sens de « catégorie, type, espèce » puis le sens de « sexe[2] ». Le mot a longtemps été majoritairement associé au genre grammatical. Le terme de « genre » (gender) a été employé pour la première fois dans un sens non-grammatical dans une publication scientifique[3] en 1955 par le psychologue et sexologue controversé[4]John Money, dans un article où il introduit le concept de « rôle de genre » (gender role) : « le terme de rôle de genre est utilisé pour désigner tout ce que dit ou fait un individu pour se dévoiler […] comme ayant, respectivement, le statut de garçon ou d'homme ou bien de fille ou de femme. Il inclut, sans y être limité, la sexualité au sens de l'érotisme »[5].
Histoire en sciences sociales |
En 1897, le sociologue Émile Durkheim est probablement le premier à souligner que la division entre hommes et femmes n'est pas réductible à une différence biologique[6]. Il va jusqu'à remettre en cause le dualisme même en lui trouvant des causes historiques : ce sont pour lui « des raisons depuis longtemps oubliées », à savoir les vertus surnaturelles attribuées au sang et au sang menstruel en particulier, qui ont « déterminé les sexes à se séparer et à former en quelque sorte deux sociétés dans la société », avec toutes les différences que cela implique en matière d'habillement, de fonctions sociales et professionnelles, de comportements, etc. Il ajoute que « rien, ni dans la constitution de l'un ni dans celle de l'autre [sexe], ne rendait nécessaire une semblable séparation »[6]. Les recherches de l'anthropologue Margaret Mead explorent l'idée et jouent un rôle majeur dans sa diffusion. Mead promeut dès 1935[7] le concept de « rôle sexué », ancêtre direct de l'idée de genre[8], qui distingue le rôle social et le sexe.
Cependant, le terme « genre » est à l'époque utilisé en un sens radicalement opposé à celui qui nous est connu aujourd'hui. Il sert avant tout à la construction d'études normatives sur des sujets relatifs à la sexualité comme le montre le cas de John Money contre lequel se sont construites les études moderne sur la question du genre.
En 1964, les psychanalystes Robert Stoller et Ralph Greenson créent[3] le concept d' « identité de genre » (gender identity) pour désigner « le sentiment qu'on a d'appartenir à un sexe particulier ; il s'exprime cliniquement par la conscience d'être un homme ou un mâle par distinction d'être une femme ou une femelle »[9]. En 1968, Robert Stoller propose d'articuler les deux notions de rôle de genre et d'identité de genre : « l'identité de genre commence avec le savoir et la réalisation, consciente ou inconsciente, que l'on appartient à un sexe et non à un autre [...] le rôle de genre est la conduite déclarée que l'on montre en société, le rôle qu'on joue, notamment vis-à-vis des autres »[10]. En 1972, John Money considère, de manière convergente, que « le rôle de genre est l'expression publique de l'identité de genre et l'identité de genre, l'expression privée du rôle de genre »[11].
En 1972, la sociologue Ann Oakley reprend le terme « genre » tout en s'écartant des définitions de Money et Stoller : elle s'appuie sur l'articulation entre nature et culture développée par Claude Lévi-Strauss pour renvoyer le sexe au biologique et le genre au culturel. À la même époque en France, plusieurs universitaires préfèrent les expressions « rapports de sexe » ou « rapports sociaux de sexe »[8],[12], pendant que d'autres, héritiers de la sociologie de Durkheim, admettent comme un acquis de longue date que la mention du sexe par un sociologue ne peut renvoyer à rien de biologique[13]. À partir des années 1980, sous l'influence de la pensée de Michel Foucault, le genre est étudié dans son rapport au pouvoir et aux normes sociales. Dans le même temps, les études de genre gagnent de l'ampleur dans les universités au-delà de la sociologie, en histoire notamment[8],[12]. La notion de genre est également utilisée par le mouvement féministe à partir des années 1970 puis 1980, qui souhaite démontrer l'oppression créée par la hiérarchie des sexes[8]. Enfin, le genre et son « injonction normative » sont la base des réflexions de Gayle Rubin et Judith Butler à partir des années 1990 dans leurs études sur les minorités sexuelles[8].
Usage courant |
En anglais, le mot « gender » est utilisé de manière courante, généralement pour exprimer les différences entre femmes et hommes en insistant sur les différences culturelles plutôt que biologiques[14]. C'est donc via les traductions de l'anglais que ce terme a pénétré les sciences sociales en France. Cependant, l'utilité de cette traduction-calque en français demeure débattue car les bornes sémantiques des termes « sexe » et « genre » ne seraient pas les mêmes en français et en anglais, le concept anglophone de « gender » étant en grande partie inclus dans le « sexe » français. C'est notamment l'avis de la Commission générale de terminologie et de néologie qui recommandait en 2005 de ne pas employer « genre » malgré son utilisation croissante dans certains champs des sciences sociales, arguant qu'« il semble délicat de vouloir englober en un seul terme des notions aussi vastes[15] », qu'« en français, le mot sexe et ses dérivés sexiste et sexuel s’avèrent parfaitement adaptés dans la plupart des cas pour exprimer la différence entre hommes et femmes, y compris dans sa dimension culturelle » et concluant que « la substitution de « genre » à sexe ne répond donc pas à un besoin linguistique[15] », et ce même si l'emploi de « genre masculin/féminin » pour désigner hommes et femmes a des attestations remontant au XVIe siècle[16].
Définition |
Le genre peut se définir de la manière suivante[17] :
« [U]n système de bicatégorisation hiérarchisée entre les sexes (hommes/femmes) et entre les valeurs et représentations qui leur sont associées (masculin/féminin). »
Définir le genre comme un système indique qu'il produit la division en deux catégories hiérarchisées ; « les sexes » désignent ces catégories produites par ce système[17].
« Bicatégorisation » indique une division en deux classes dissymétriques et mutuellement exclusives, « hiérarchisée » signifie que ces classes sont organisées selon un ordre de priorité. Ainsi, le genre produit la division en deux classes exclusives (homme/femme) dont l'une est prioritaire sur l'autre. Le genre désigne donc un rapport social (notion de rapport de pouvoir, de hiérarchie, de domination) et un diviseur (notion de catégorisation, en l'occurrence binaire)[17].
Le genre se distingue des genres, ces derniers renvoyant à un sens grammatical (féminin, masculin)[17].
Il faut noter que le genre est polysémique et a donc de multiples usages. Ainsi le concept moderne prend forme via à une succession d’analyses qui s’amendent les unes les autres (non sans contradiction) et d'autres concepts se sont accumulé graduellement par couches successives au cours du temps à partir de l’opération initiale qui a consisté à le distinguer du « sexe »[17]. Donc, bien que le genre se distingue du sexe[18][réf. insuffisante] (c'est à dire indépendamment des attributs anatomiques et biologiques, il s’intéresse spécifiquement à la différence sociale, ce qui permet au concept de genre de penser les relations entre femmes et hommes sous le seul angle des rapports sociaux, ce que n'interdit pas non plus l'analyse des types sexuels), cette définition exprime la dimension sociale du sexe[17] (rompant ainsi avec la vision dichotomique entre nature (invariant) et culture (variable)[17].
Bien qu'il y ait une articulation entre sexualité, genre et sexe[19],[20], le genre est distinct des notions d'orientation sexuelle (hétérosexualité, bisexualité, homosexualité, pansexualité, asexualité) et de préférence sexuelle. Le genre se distingue aussi de la transidentité[21].
Construction sociale |
Première vague : le sexe social |
Le sociologue Émile Durkheim, a traité du genre et du rapport homme/femme dans une perspective constructiviste dès 1897[6]. Simone de Beauvoir écrit dès 1949, en clin d'œil à « On ne naît pas homme, on le devient » d'Érasme : « on ne naît pas femme, on le devient[22]. ». Dans Le Deuxième Sexe, elle explique comment la civilisation et l'éducation agissent sur les enfants pour les orienter dans un rôle masculin ou féminin qui sert l'ordre social alors même que filles et garçons ne sont pas initialement distinguables[23].
La sociologue britannique Ann Oakley[24] en 1972 explique que masculinité et féminité ne sont pas des substances « naturelles » inhérentes à l’individu, mais des attributs psychologiques et culturels, fruits d’un processus social au cours duquel l’individu acquiert les caractéristiques du masculin ou du féminin. Elle propose ainsi d’introduire la notion de genre comme outil d’analyse pour permettre la distinction entre la dimension biologique (le sexe) et la dimension culturelle (le genre).
Le genre est ainsi l'identité construite par l'environnement social des individus : la masculinité ou la féminité ne sont pas des données naturelles mais le résultat de mécanismes de construction et de reproduction sociale. Consciemment ou inconsciemment, la société s’organise selon le paradigme des « choses des hommes » et des « choses des femmes », au point que l’on se convainc qu’il existe des domaines ou des niveaux de domaines socialement réservés à tel ou tel des deux sexes[25][réf. à confirmer].
Deuxième vague : critique et révision du sexe social |
Judith Butler en 1990 ajoute que le genre est « performatif » : les actes et les discours des individus non seulement décrivent ce qu'est le genre mais ont en outre la capacité de produire ce qu'ils décrivent. Ainsi, le genre « désigne l’appareil de production et d’institution des sexes eux-mêmes »[26]. Elle décrit le genre comme « une série d’actes répétés […] qui se figent avec le temps de telle sorte qu’ils finissent par produire l’apparence de la substance, un genre naturel de l’être »[27].
Ainsi, pour la sociologue Christine Delphy en 2003, penser le sexe en termes de donnée biologique est une impasse. Pour elle, le sexe est avant tout la représentation du « biologique » par la société : « le genre précède le sexe ; dans cette hypothèse le sexe est simplement un marqueur de la division sociale »[28]. Cette division sociale binaire entre masculin et féminin n'est pas universelle puisque certaines sociétés peuvent inclure un troisième sexe avec des rôles qui sont considérés comme distincts des rôles féminins ou masculins[29] ; ce troisième sexe peut inclure les intersexes ou les eunuques[30]. Des exemples en sont les Hijras du sous-continent indien ou les Muxe de l'Oaxaca (Mexique)[31].
Cette division des êtres humains en deux groupes (bicatégorisation entre femmes et hommes), groupes présentés comme universels et anhistoriques, reflèterait une réalité biologique. Or, des travaux dès 1990 (voir en particulier Thomas Laqueur) [32] montrent que cette bicatégorisation ne va pas de soi, n'est pas figée dans le temps et dans l'espace. Dans cette approche, les sciences naturelles ont construit « scientifiquement » le sexe ; elles seraient à l'origine de la bicatégorisation des sexes et même de l'infériorité supposée d'un sexe (en l’occurrence le sexe féminin) en regard de l'autre.
D'ailleurs parmi les contributions aux études sur le genre, on retrouve la biologiste Anne Fausto-Sterling qui à, travers notamment la question de l'intersexuation, montre que nos structures reproductives sont, selon elle, presque dimorphes mais pas complètement [33],[34],[35]. Il existe un ensemble de critères d’ordre biologique que la sociologie ne nie pas, mais explique que le travail par lequel ces critères sont liées ensemble et unifiées est en revanche un fait social: l’existence de variable continue ("continuum sexuel" [36]) pour chacun des critères montre une volonté sociale d'une classification dichotomique [37],[38].
Assignation |
La philosophe Elsa Dorlin en 2008 [39] explique (notamment dans le cadre des personnes intersexes) que la détermination d'un sexe ne consiste pas uniquement d'assigner un sexe mais le "bon sex" [40]. Ainsi une identité sexuelle (de genre et de sexualité) est imposée et assignée lors d'une "détermination" du "sexe biologique"[41].
Critères biologique d'assignation à un sexe à la naissance |
- Les gonades mâle (testicules) et femelle (ovaires) peuvent produire des gamètes mâles (spermatozoïdes) et femelles (ovules).
- Les morphologies génitales, comme la phallométrie, c'est à dire la mesure de la taille du pénis, (en france c'est l'échelle de Prader), ou l’enquête cryptorchidie.
- Les chromosomes et caryotype (système XY avec le gène “SRY” qui détermine le sexe gonadique, cependant peu utilisé pour l’assignation sexuelle).
- Les hormones (testostérone/œstrogène) et système endocrinien (sert entre beaucoup d’autre chose à la régulation des gonades).
Chacun de ses critères biologique (sexe humoral, sexe gonadique, sexe hormonal, sexe chromosomique) pris de manière isolé ne suffit pas lui seul à déterminer un sexe de façon sûr [17]. Les opération chirurgicale de réattribution sexuelle lors d'ambiguïté génitale (on parlera alors de personne intersexe) montre une "nécessité sociale" de la distinction homme/femme de façon dichotomique et strictement opposé[35].
Processus relationnel |
Ainsi, le genre est une construction sociale dans la mesure où les usages sociaux attribuent « des rôles, des tâches, des caractéristiques et des attributs » différenciés à chaque sexe[42]. Ces caractéristiques sont proposées, voire imposées, dans la relation de l'individu avec les autres et avec la société, dès sa naissance. En effet, « le sexe est l’une des premières caractéristiques, si ce n’est la première, que les parents et l’entourage social connaissent de l’enfant qui vient de naître »[42]. Les travaux sociologiques et psychologiques montrent que le sexe est une donnée biologique qui influe les rapports sociaux des parents à l'enfant, ceux de la société avec l'enfant : il existe une « socialisation sexuée » qui contribue à la construction de l'identité de l'enfant[42].
Ainsi selon Lawrence Kohlberg, les enfants apprennent à connaître les usages sociaux de genre à partir de leur environnement, comme autant de stéréotypes. Lorsqu'ils acquièrent la « consistance de genre » (la connaissance que leur sexe est fixe), vers six ans[réf. nécessaire], le fait de se conformer à ce qu'on attend de leur type sexuel (par exemple, jouer aux poupées pour les petites filles et au camion de pompier pour les garçons) serait alors gratifiant socialement. Et à l'inverse, certaines sociétés ou groupes humains peuvent considérer comme inacceptable de ne pas se comporter en accord avec son type sexuel et avec son genre[43]. L'approche psychosociologique ajoute que les différences de comportements entre femmes et hommes sont le produit de la division sexuelle des tâches et que cette division se maintient par les pratiques traditionnelles et culturelles : les stéréotypes de genre façonnent la perception des comportements et conduiraient à leur propre réalisation[43]. Toutefois, les pratiques peuvent évoluer avec le temps et d'un pays à l'autre : les stéréotypes de genre évoluent dans l'espace et le temps[43].
De même, en sociologie, l'approche interactionniste parle du genre comme quelque chose qui est « accompli » : les attributs féminins et masculins n'existent que par le sens qui est donné aux actes des femmes et des hommes. Erving Goffman développe ainsi une approche dramaturgique : les personnes agissent comme des acteurs sur une scène dont les comportements sont interprétés[44].
Rapport de pouvoir |
La division des rôles sociaux est parfois perçue comme induisant une hiérarchie, pour les sociétés qui éprouvent ce besoin de positionner respectivement le masculin et le féminin. Émile Durkheim, dans un article de 1902 écrit avec Marcel Mauss, considère que « toute classification implique un ordre hiérarchique »[45]. L'historienne Joan W. Scott présente, en 1988, cette dimension en ces termes : « le genre est un élément constitutif de rapports sociaux fondés sur des différences perçues entre les sexes, et le genre est une façon première de signifier des rapports de pouvoir »[46].
L'anthropologue Françoise Héritier constate que la distinction entre féminin et masculin est universelle et que « partout, de tout temps et en tout lieu, le masculin est considéré comme supérieur au féminin »[47] ; elle appelle cela « la valence différentielle des sexes ». Partant des travaux de Claude Lévi-Strauss, elle observe qu'un présupposé fondamental manque à sa théorie de l'alliance : pourquoi les hommes se sentaient-ils le droit d'utiliser les femmes comme monnaies d'échange ? « Sous toutes les latitudes, dans des groupes très différents les uns des autres, nous voyons des hommes qui échangent des femmes, et non l’inverse »[48].
Selon Françoise Héritier, l'observation du monde incluant les différences anatomiques et physiologiques conduit à une classification binaire : « La plus importante des constantes, celle qui parcourt tout le monde animal, dont l’homme fait partie, c’est la différence des sexes. (…) Je crois que la pensée humaine s’est organisée à partir de cette constatation : il existe de l’identique et du différent. Toutes les choses vont ensuite être analysées et classées entre ces deux rubriques. (…) Dans toutes les langues il y a des catégories binaires »[49]. Elle constate que dans toutes les langues, ces catégories binaires sont rattachées au masculin ou au féminin. Par exemple, le chaud et le sec sont rattachés au masculin dans la pensée grecque, le froid et l'humide au féminin. Or ces catégories sont toujours culturellement hiérarchisées : « L’observation ethnologique nous montre que le positif est toujours du côté du masculin, et le négatif du côté du féminin. Cela ne dépend pas de la catégorie elle-même : les mêmes qualités ne sont pas valorisées de la même manière sous toutes les latitudes. Non, cela dépend de son affectation au sexe masculin ou au sexe féminin. (…) Par exemple, chez nous, en Occident, “actif” (…) est valorisé, et donc associé au masculin, alors que “passif”, moins apprécié, est associé au féminin. En Inde, c’est le contraire : la passivité est le signe de la sérénité (…). La passivité ici est masculine et elle est valorisée, l’activité – vue comme toujours un peu désordonnée – est féminine et elle est dévalorisée »[50].
Pour Friedrich Engels, qui a développé la théorie marxienne de la lutte des classes en analysant la famille, la relation exploitant-exploité qui existe entre la bourgeoisie et le prolétariat s'étend au foyer, dans lequel le mari est un autocrate : avec l'émergence de l'économie capitalistique, le travail domestique de la femme, qui ne produit pas de surplus, n'a aucune importance[51].
Cette hiérarchie du masculin-féminin est analysée par le sociologue français Pierre Bourdieu comme une véritable domination masculine socialement construite : « c'est à travers toute une éducation, composée de rituels d'intégration de la norme masculine, que se façonne l'identité masculine, et que l'homme assure dans la société une fonction de reproduction de la domination »[52].
Pour Isabelle Jacquet[53] ce sont les hommes qui dominent, légifèrent, commandent, condamnent, tandis que les femmes leur sont inférieures dans cette organisation. L'anthropologue Nicole-Claude Mathieu parle d'androcentrisme comme un biais concernant la non-prise en considération des rapports sociaux dans lesquels les femmes sont impliquées[54].
Dans de nombreuses sociétés humaines, les progrès en matière d'égalité des sexes peuvent venir corriger ces appréciations. Les sociétés disposent de différents moyens, juridiques, d'éducation, de sensibilisation, contribuant à l'effacement de toute hiérarchie entre masculin et féminin[55],[56].
Genre et autres rapports de pouvoir |
Le genre, en tant que rapport de pouvoir, ne peut être envisagé de manière séparée d'autres rapports de pouvoir basés sur la « race », la classe sociale, la sexualité, l'âge, etc[21].
Une telle approche, liant race, classe et genre, a notamment été développée par le féminisme afro-américain à partir des années 1960 pour lequel l'explication des oppressions raciale et de classe nécessite de prendre en compte le genre. L'attention portée à la diversité socio-culturelle s'est répercutée notamment en sociologie[57].
Ainsi, pour l'historienne Joan W. Scott, « on ne peut comprendre l’identification raciale indépendamment de l’identification de genre : les deux sont construites ensemble, et chacune renvoie à l’autre »[58]. Elle observe notamment dans le discours contemporain à la colonisation de l'Algérie des métaphores liant dévoilement et pénétration[réf. nécessaire], domination coloniale et domination sexuelle, qu'elle met en parallèle avec les débats entourant le voile islamique en France qui concerne l'immigration mais se focalise sur les femmes et leur corps[58].
Un groupe de recherche de l'Institut d'histoire du temps présent (IHTP) du CNRS s'est penché sur l'impact du genre dans l'histoire des intellectuels[59].
Politique publique et genre |
Le concept de genre et les recherches universitaires liées servent parfois de base aux politiques publiques visant à réduire les inégalités entre les femmes et les hommes. Verena Keller met ainsi en exergue la nécessité d’analyser et de prendre en compte les inégalités de genre pour améliorer l’efficacité du travail social[60]. En France, l'Inspection générale des affaires sociales note en effet que « Toutes les politiques de promotion de l'égalité butent sur un obstacle majeur, la question des systèmes de représentation, qui assignent hommes et femmes à des comportements sexués, dits masculins et féminins, en quelque sorte prédéterminés »[61] ainsi selon certains il faudrait « substituer à des catégories comme le sexe […] le concept de genre qui […] montre que les différences entre les hommes et les femmes ne sont pas fondées sur la nature, mais sont historiquement construites et socialement reproduites »[62][réf. insuffisante].
De manière notable, le terme de « genre » est ainsi intégré dans le rapport final de la conférence mondiale sur les femmes de Pékin, organisée par l'ONU en 1995. Il s'agit alors d'appréhender les inégalités de manière holiste, dans une réflexion qui englobe les hommes et les dynamiques sociales[63].
La notion de genre est également utilisée par l'Organisation mondiale de la santé, pour qui « le mot “genre” sert à évoquer les rôles qui sont déterminés socialement, les comportements, les activités et les attributs qu'une société considère comme appropriés pour les hommes et les femmes[64]. » L'UNESCO place l'égalité de genre parmi ses priorités globales, la considérant comme « une condition essentielle permettant aux femmes et aux hommes de bénéficier pleinement de leurs droits humains[65]. »
Inégalités entre hommes et femmes |
Les études sur les inégalités entre les sexes perdurent ; ainsi, les études de genre fondées sur l'analyse des inégalités entre êtres masculins et êtres féminins coexistent avec les études sur les inégalités entre les sexes. Par exemple, le Comité France de l'ONU fait réaliser par un cabinet de consultants et diffuse l'étude "Bienvenue sur la planète Femmes"[66],[67].
L'organisme national français de statistiques, l'INSEE, mesure des inégalités entre les sexes « mais qui se réduisent »[68].
La journée annuelle des droits des femmes présente l'occasion de rappeler les inégalités entre les sexes[69].
Les inégalités entre les sexes se traduisent par les violences faites aux femmes, mais également par les violences faites aux hommes[70],[71], lesquelles représentent un quart des violences domestiques[72].
Critiques du concept de genre et « théorie du genre » |
L'expression « théorie du genre » : querelle sémantique |
L'expression « théorie du genre » est parfois présentée comme une traduction de l'expression anglaise « gender theory »[73],[74],[75]. Selon d'autres auteurs, en revanche, il s'agit d'une « francisation maladroite des gender studies », les études de genre[76],[77],[78],[Note 1]. Ainsi, la pertinence de l'expression « théorie du genre » est contestée par de nombreux chercheurs estimant que le genre n'est pas une théorie mais plutôt une notion qu'ils utilisent ponctuellement[84],[85],[86].
L'expression « théorie du genre », calquée sur l'anglais « gender theory », ne serait par ailleurs pas anodine[87] : alors que l'anglais « theory » peut avoir le sens d'une « hypothèse testée et confirmée »[88], le sens français de « théorie » est celui d'une « construction intellectuelle méthodique et organisée de caractère hypothétique »[89]. Pour François Cusset, cité par Éric Aeschimann dans un article du Nouvel Observateur, « aux États-Unis, le mot “theory” désigne un discours critique à contenu philosophique mais qui a dépassé le cercle des philosophes. » Et pour Aeschimann, « a contrario, en français, la “théorie” peut renvoyer à un système de pensée très cohérent, et alors, en effet, le genre n’est [pas] une théorie »[90].
Au contraire, le sociologue Éric Fassin insiste sur le fait que « le genre est un concept. Ce n'est ni une théorie ni une idéologie, mais une notion qui aide à penser »[1]. L'expression « théorie du genre » serait, selon Laure Bereni, une tentative de faire croire qu'il existe une stratégie politique unifiée derrière les études de genre[84].
Selon Odile Fillod, chercheuse indépendante[91],[92],[93], l'expression « théorie du genre » aurait été créée au début des années 2000 par Tony Anatrella à des fins rhétoriques, dans le cadre de l'offensive menée par le Vatican contre les politiques qui remettent en cause les rôles des sexes dans la société et qui favorisent les droits des femmes et étendent les droits des personnes LGBT[94]. L'historienne Joan W. Scott voit également dans cette expression une « invention » des catholiques « qui a remplacé le communisme dans la rhétorique du Vatican ». Pour elle, cette expression est utilisée par « les adversaires du “genre” » qui entendent faire valoir que les différences entre femmes et hommes établissent « une complémentarité qui justifierait selon eux une inégalité »[58]. Le politologue Bruno Perreau estime lui aussi que « la “théorie du genre” n'existe que dans la tête des opposants à l'égalité des droits. Cette croyance repose sur le fantasme selon lequel le sexe et la sexualité pourraient être déterminés par un simple discours »[95].
Le journaliste Éric Aeschimann considère néanmoins que le terme de théorie est approprié « même s’il n’existe pas une doctrine unifiée » autour du genre, car ce mot a également le sens d'« hypothèse » : or les études de genre font « l’hypothèse que les identités sexuelles ne sont pas biologiquement déterminées, mais socialement construites »[90].
Cependant, pour d'autres chercheurs, l'emploi de « théorie du genre » au singulier masquerait la pluralité de thèses aussi différentes que celles de Judith Butler ou Christine Delphy[87]. Ainsi, dans un contexte universitaire, lorsque l'expression « théories du genre » est employée, c'est presque toujours au pluriel : Anne-Emmanuelle Berger affirme ainsi que « la théorie du genre n'existe pas. Il en existe une multitude »[96] et Judith Butler que « les théories du genre existent au pluriel »[97].
L'expression « théorie du genre » employée par Vincent Peillon, ministre de l'Éducation nationale en mai 2013[98],[99] suscite de nombreuses réactions dans le monde des sciences sociales[100] et notamment la publication d'une tribune, signée par une centaine d'universitaires, qui indique qu'« il n’y a pas “une” théorie du genre, fantasme entretenu par ceux et celles que la perspective d’une égalité effective dérange ou effraie, mais “des” études de genre »[86],[101]. Après avoir employé l'expression en 2011[102], Najat Vallaud-Belkacem la juge, en 2013, impropre[103].
En dépit des protestations des chercheurs, la philosophe Bérénice Levet réitère que « pour qu'il y ait des études de genre, encore faut-il que ce petit vocable de genre ait été conceptualisé, théorisé. Or, lorsque nous parlons de théorie du genre, nous n'affirmons rien d'autre. Judith Butler se définit elle-même comme théoricienne du genre. Il a été forgé afin d'affranchir l'identité sexuelle du sexe biologique. Au commencement est la neutralité, en quelque sorte, et seule la machine sociale vous « assigne » à une identité »[104].
Idéologie de déconstruction |
Des critiques du concept de genre — alors généralement désigné par les expressions « théorie du genre », « théorie du gender » ou « gender » — émergent dès les années 1980[105] puis se développent dans les années 1990 sous la plume notamment d'auteurs catholiques, en particulier après que la notion de genre fut intégrée au rapport final de la quatrième conférence mondiale sur les femmes malgré les objections du Saint-Siège[106]. Ces auteurs dénoncent ce qui est, selon eux, « un discours idéologique unifié qui aurait pour but de déstabiliser les rapports traditionnels entre les sexes[87]. »
Pour les critiques, avant d'être un outil d'analyse, le genre est une « théorie et même une métaphysique » dont l'objectif est de « déconstruire » les fondements de notre société au nom du principe d'égalité entre hommes et femmes poussé jusqu'à l' « interchangeabilité »[107]. Pour certains de ces auteurs, le genre est une notion « arbitraire »[108] dérivée à la fois du socialisme et du libéralisme, alliant « égalitarisme » et « utilitarisme », susceptible de « s’imposer violemment aux différentes cultures à travers la mondialisation »[109],[110] et témoignant d'une « soif d'auto-suffisance »[108]. Le genre agirait comme l'instrument d'une « nouvelle culture[111] » fondée sur la remise en cause de la sexualité humaine comme « inclination vers l'autre sexe »[108] et la contestation des « rôles fondés sur les différences naturelles »[111]. Selon la philosophe Chantal Delsol, avec la « théorie du gender », nous sommes « à l'acmé de la volonté de refaire le monde selon notre désir » et la consécration du « désir de l'individu de choisir, sinon son sexe biologique, au moins son appartenance de « genre » »[112]. Elle considère qu'« apprendre le gender à l'école [...] dans le cours de SVT (sciences de la vie et de la terre) » est « de la propagande », car « il ne s'agit aucunement d'une partie de la science, mais bien d'une opinion, et plutôt en l'occurrence d'une idéologie[112]. »
Pour certains auteurs, tels que le prêtre Michel Schooyans, le psychanalyste Jacques Arènes ou le prêtre et psychologue Tony Anatrella, le genre est une idéologie utilisée par une minorité subversive et militante emmenée par le « lobby homosexuel » et le mouvement LGBT[109] qui « s’en prend délibérément à tout ce qui pourrait rappeler et signifier la différence sexuelle »[113] afin de remettre en cause la prééminence de l'hétérosexualité [114] et revendiquer le mariage homosexuel[115].
Selon le pape Benoît XVI, « ce qui est souvent exprimé et entendu par le terme « gender », se résout en définitive dans l’auto-émancipation de l’homme par rapport à la création et au Créateur »[116] et légitime le mariage homosexuel, l'homoparentalité[117] et la procréation médicalement assistée[118],[87],[119].
Polémique en France |
De même, en France, des opposants au mariage des couples homosexuels, notamment La Manif pour tous, établissent un lien entre la « théorie du genre » et l'ouverture du mariage aux couples de même sexe[120] ou des programmes de lutte contre les stéréotypes filles-garçons à l'école [121]. Ces positions trouvent écho chez certains politiques, en premier lieu au sein de la droite catholique conservatrice, puis auprès de nombreux députés et sénateurs UMP[122], qui demandent par exemple la création d'une commission d'enquête à l'Assemblée nationale, regrettant que les études de genre aient intégré la « théorie du gender »[123] qu'ils présentent comme un système de pensée et d’organisation globale de la société refusant en général ce qui est donné par la nature et en particulier le corps sexué lui donnant un « sens subversif de l’indifférenciation des sexes »[123]. Ces députés attribuent ainsi à la « théorie du gender » la création de laboratoires sur le genre dans différents établissements d'enseignement supérieur, l'introduction d'un chapitre intitulé « Devenir homme ou femme » dans les manuels scolaires de sciences de la vie et de la terre de première, la répression des discriminations fondées sur l'orientation ou l'identité sexuelle, la lutte contre les stéréotypes filles-garçons dans certaines crèches, le remplacement de certains termes du code civil comme « femme et mari » par « époux » et « père et mère » par « parent » dans le cadre du projet de loi sur le mariage homosexuel ou encore le programme de lutte du gouvernement contre les discriminations basées sur l'orientation sexuelle[123],[124]. À partir de 2013, divers groupes politiques, liés pour certains à La Manif pour Tous, ont lancé en France des campagnes prêtant à l'Éducation nationale l'intention d'enseigner la « théorie du genre » à l'école[125],[126] ; les groupes les plus radicaux ont affirmé que cet enseignement s'accompagnerait de cours d'éducation sexuelle dès l'école maternelle et de propagande en faveur de l'homosexualité[réf. nécessaire]. Bien que rapidement démenties, ces rumeurs ont occasionné des mouvements d'inquiétude, notamment dans certains milieux issus de l'immigration[127],[128].
Négation de la biologie |
Pour Claudine Junien, professeur émérite de génétique médicale, et Peggy Sastre, journaliste scientifique, le genre est devenu « un cache-sexe » qui occulte l’inné, le biologique, le « sexe ». Elles considèrent que le genre masque les différences qui existent entre les hommes et les femmes sous prétexte d’éviter toute discrimination, et pénalise ainsi tout à la fois hommes et femmes. A contrario, elles pensent que les progrès de la recherche médicale passent par une segmentation beaucoup plus poussée entre les deux sexes[129].
Les travaux d'Anne Fausto-Sterling et notamment l'idée d'un continuum sexuel sont contestés par d'autres chercheurs[132] qui considèrent que la sexualité humaine est binaire par nature dans le but de reproduire notre espèce et que le cas de rares troubles du développement sexuel ne saurait constituer un « continuum »[133]. Les chercheurs en études de genre (par exemple la sociologue Christine Deplhy[134] ou Rebecca M. Jordan-Young professeure en sociologie des sciences médicales) explicitent pourtant qu'il ne s'agit pas de nier l'existence de l'anatomie ou de la biologie [17](p33,38). Certains d'entre eux, comme Anne Fausto-Sterling, sont d'ailleurs biologistes ou comme Catherine Vidal sont neurobiologiste, et intègrent ces disciplines dans leurs travaux.
Aspect non scientifique |
En Norvège, l'humoriste Harald Eia a réalisé en 2010 une série de documentaires intitulés « le paradoxe de l'égalité des genres ». Il y critique l'absence de caractère scientifique, selon lui, des études sur le genre et les stéréotypes, s'appuyant notamment sur des entretiens avec le psychologue britannique Simon Baron-Cohen. Suite à ces documentaires, un large débat a eu lieu en Norvège[135],[136]. Le transfert du Nordisk institutt for kunnskap om kjønn (en) est parfois attribué à ce débat, ce que le gouvernement de l'époque a démenti[137],[138]. Des copies de ces vidéos ont largement circulé sur la « réacosphère » francophone[139].[non pertinent]
Dans La loi du genre (Belles Lettres, 2015) l'essayiste belge Drieu Godefridi souligne l'incapacité, selon lui, des études de genre à lister exactement et exhaustivement les stéréotypes, montrant ainsi les limites d’une référence « scientifique » aux stéréotypes comme facteurs explicatifs des injustices de genre. Il soutient que le « genre » n’est pas une science, mais une tentative idéologique et révolutionnaire de recréer l’homme et la femme par la contrainte de l’État, en niant leur altérité[140],[141].[non pertinent]
Notes et références |
Notes |
L'expression gender theory est utilisée par plusieurs sociologues américains pour désigner leur champ d'études. Selon Myra Marx Ferree, la gender theory « se concentre sur la manière dont on attribue à des comportements et des rôles spécifiques une signification en matière de genre, sur la manière dont on divise le travail pour exprimer symboliquement les disparités entre les genres et sur la manière dont diverses structures sociales [...] incorporent des valeurs ou confèrent des avantages liés aux genres »[79]. Selon Jean Potuchek, qui se réfère notamment à l'article Doing gender (en) de Candace West et Don Zimmerman, la gender theory « définit le genre non pas en tant que rôle individuel appris dès l'enfance et relativement stable par la suite, mais en tant que système d'inégalités qui se crée et se recrée dans l'expérience quotidienne [...] Les sociologues en gender theory ne font pas d'hypothèse à propos du « caractère naturel » des catégories de genre dichotomiques, mais ils examinent la construction sociale de ces catégories à travers un ensemble de frontières qui définissent ce qui est mâle ou femelle, masculin ou féminin »[80]. Ce point de vue n'est cependant pas le seul, différents auteurs soulignant la variété des approches sociologiques de la gender theory[81],[82]. La « gender theory », en tant que mise en œuvre du concept de genre, est donc une notion connexe des études de genre, dans lesquelles le concept de genre est appliqué[83].
Références |
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C'est par exemple sous le patronage de Pierre Bourdieu qu'en 1968 et 1969 ont été éditées en trois gros volumes de nombreux textes de Marcel Mauss. Or, huit de ces textes ont été regroupés en 1971 dans un petit livre de synthèse (Marcel Mauss, Essais de sociologie, Le Seuil, 1971(lire en ligne)). L'un d'eux, écrit 1903 avec Durkheim, affirme que tout principe de classification est un fait historique et non biologique et implique une hiérarchie. Un autre, écrit en 1931, fait explicitement entrer le sexe parmi ces principes de classification.
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Dorlin, Elsa., Sexe, genre et sexualités : introduction à la théorie féministe, Presses universitaires de France, 2008(ISBN 9782130558897 et 2130558895, OCLC 278432147, lire en ligne), p. 38 :« La sexuation n'est donc pas le tout du "sexe": dans la définition commune du "sexe biologique", l'anatomie n'est jamais seule. Autrement dit, il y a toujours déjà, dans ce que nous appréhendons communément comme le "sexe biologique" des individus, du genre et les traces d'une gestion sociales de la reproduction, c'est à dire, une identité sexuelle (de genre et de sexualité) imposée, assignée. »
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Théorie du genre : des élèves absents du fait d'une étrange rumeur, Le Figaro, 29 janvier 2014
"Masturbation", "théorie du genre" à l'école... Décryptage de cinq folles rumeurs, France TV Info, 31 janvier 2014
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Annexes |
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Bibliographie |
Ouvrages généraux |
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Pierre Bourdieu, La domination masculine, Paris, coll. Liber Le Seuil, 1998
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Judith Butler
Trouble dans le genre. Le féminisme et la subversion de l'identité. Paris : La Découverte, 2006
Ces corps qui comptent. De la matérialité et des limites discursives du "sexe"., (traduction Charlotte Nordmann) Paris, Éditions Amsterdam, 2009
Défaire le genre, (traduction Maxime Cervulle) Paris, Éditions Amsterdam, 2012
Christine Delphy
L'ennemi principal (Tome 1): économie politique du patriarcat, Paris, Syllepse, 1998. (Réédité en 2009 par Syllepse, (ISBN 2849501980)
L'ennemi principal (Tome 2): penser le genre, Paris, Syllepse, Paris, 2001. (Réédité en 2009 par Syllepse, (ISBN 2907993887)
Penser le genre: quels problèmes ? Dans M.-C. Hurtig, M. Kail, & H. Rouch, Sexe et genre. De la hiérarchie entre les sexes (p. 89-102). Paris : CNRS Éditions, 2003
Juliette Rennes (dir.), Encyclopédie critique du genre, Paris, La Découverte, 2016 (ISBN 9782707190482)
Joan Wallach Scott
La Citoyenne paradoxale. Les féministes françaises et les droits de l'homme, Albin Michel, 1998
De l'utilité du genre, Paris, Éditions Fayard, 2012.
Anne Fausto-Sterling
- (en) Fausto-Sterling, Anne, Myths of gender: biological theories about women and men, New York, BasicBooks, 1992, 2e éd., poche (ISBN 978-0-465-04792-5, LCCN 92053170)
- (en) Fausto-Sterling, Anne, Sexing the body: gender politics and the construction of sexuality, New York, Basic Books, 2000, 1re éd., poche (ISBN 978-0-465-07714-4, LCCN 00703212)
- Fausto-Sterling, Anne, (trad.) Bonis, Oristelle, Bouillot, Françoise, Corps en tous genres : La dualité des sexes à l'épreuve de la science, Paris, La Découverte, coll. « SH / Genre & Sexualité », octobre 2012, 1re éd., 400 p., 155 * 240 mm (ISBN 9782707169105, LCCN 00703212)
- Fausto-Sterling, Anne, (trad.) Boterf, Anne-Emmanuelle, Les cinq sexes : Pourquoi mâle et femelle ne suffisent pas, Paris, Payot, coll. « Petite Bibliothèque Payot no 917 », avril 2013, 1re éd., 96 p. (ISBN 9782228908856)
Erving Goffman, L'arrangement des sexes. Paris: La Dispute, 2002
Georges-Claude Guilbert, C'est pour un garçon ou pour une fille? La Dictature du genre. Paris : Autrement, 2004- Isabelle Jacquet, Développement au masculin/féminin, le genre outil d’un nouveau concept, Paris, L’Harmattan, 184 p., 2000
Nathalie Heinich, États de femme. L'identité féminine dans la fiction occidentale, Collection NRF Essais, Gallimard, avril 1996
Donna Haraway, Manifeste cyborg et autres essais, Exils, 2006
Rosi Braidotti, La Philosophie... là où on ne l'attend pas, Larousse, 2009- Collectif, sous la direction de Eleni Varikas, Sous les sciences sociales, le genre. Relectures critiques de Max Weber à Bruno Latour, La Découverte, 2010
Maryse Vaillant, Sexy soit-elle, Les Liens qui libèrent, 2012
(en) Ann Oakley, Sex, Gender and Society, Temple Smith, London, 1972
Françoise Thébaud, Écrire l'histoire des femmes et du genre, Lyon, ENS éditions, 2007.
Clio, Femmes Genre Histoire (revue), 1995
Ouvrages critiques |
Sylviane Agacinski, Femmes entre sexe et genre, Seuil, 2012
Tony Anatrella, Gender - La controverse, Téqui, 2011
Alain de Benoist, Les Démons du Bien : du Nouvel Ordre Moral à l'idéologie du genre, Pierre-Guillaume de Roux, 2013- Christian Flavigny, La Querelle du genre, PUF, 2012
- Drieu Godefridi, De la violence de genre à la négation du droit, Texquis, 2013
Béatrice Bourges, Aude Mirkovic, Elizabeth Montfort, De la théorie du genre au mariage de même sexe... L'effet Domino, Peuple Libre, 2013.
Elizabeth Montfort, Le Genre démasqué : Homme ou Femme ? le choix impossible, Peuple libre, 2011- Marguerite Peeters A., Le Gender, une norme mondiale ? : Pour un discernement , Mame, 2013
Michel Schneider, La Confusion des sexes, Flammarion, 2007- Collectif, Gender, qui es-tu ?, Éditions de l'Emmanuel, 2012
L'éducation à l'âge du gender : Construire ou déconstruire l'homme ?, Michel Boyancé, Rémi Brague, Thibaud Collin, Frédéric Crouslé, Jean-Noël Dumont et Xavier Lacroix, éditions Salvator, coll.carte blanche, 2013, (ISBN 9782706709814)
Jacques Wajnsztejn, Rapports à la nature, sexe, genre et capitalisme, Acratie, 2014.
Bérénice Levet, La Théorie du genre ou Le monde rêvé des anges : essai, Grasset, 2014.
Articles connexes |
Études de genre, Histoire du genre
Différence des sexes en psychanalyse, Comparaison biologique entre la femme et l'homme
Inégalités homme-femme, Sexisme
Identité de genre, Transidentité, Non-binaire
Virilité, Masculinité, Féminité
Féminisme, Queer, Théorie queer
- Test de Bechdel
- Histoire des femmes (historiographie)
Liens externes |
- Laboratoire GenERe (Genre: Epistémologie & Recherches)
Ça fait genre, Anne-Charlotte Husson, agrégée de Lettres modernes
Cultures G, genre et cultures contemporaines
Dossier d'articles « genre et Europe », encyclopédie EHNE
- France-Culture, dans « La Fabrique de l'Histoire », consulté le 6 mars 2017, sur « le premier Dictionnaire des féministes en France » (Christine Bard): [2]
Fluide, intersexe, trans, neutre, le champ lexical du genre s'élargit sur TV5 monde, 17 octobre 2017.
Claude Meillassoux, La grande entreprise historique du mâle, revue Période, première publication sous le titre de « Le mâle en gésine, ou De l’historicité des mythes » dans Cahiers d’études africaines, vol. 19, n° 73-76, 1979, pp. 353-380.
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